Droits sociaux : Les trois indicateurs de la honte !
Le rapport 2021 de l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH) couvrant la situation des différents droits humains durant l’année 2020 s’inquiète de l’impact du Covid19 sur les citoyens. Il ressort de ce document d’observation annuelle la poursuite « de nombreuses violations, diverses et quotidiennes, sans oublier que l’Etat a profité de la pandémie du coronavirus pour bafouer de nombreux droits et libertés sous prétexte de l’état d’urgence sanitaire ». Dans cet article, ENASS met le focus sur la situation des droits économiques et sociaux. Dans un contexte de pandémie, l’AMDH alerte sur« la détérioration globale à tous les niveaux qu’elle soit liée au droit au travail, aux droits liés au travail, le droit au logement, le droit à la santé, le droit à l’éducation, les droits linguistiques et culturels ainsi que le droit à la protection sociale ».
Droit du travail : 47 décès en milieu professionnel
Malgré l’arrêt de l’activité économique durant une partie de l’année, les décès en milieu de travail se sont poursuivis. L’année 2020 a enregistré« 47 décès sur les lieux de travail ou en route vers ces lieux ou suite à des accidents du travail en raison de l’absence de conditions de sécurité sur les lieux de travail et sur les chantiers », selon un décompte de l’AMDH.
Ce chiffre confirme que « les violations se sont poursuivies, et exacerbées même par le déclenchement de la pandémie de Corona, car les autorités et les employeurs n’ont trouvé aucune gêne à exploiter cette situation, pour bafouer encore plus tous les droits et libertés fondamentaux liés au travail », poursuit l’organisation présidée par Aziz Rhali.
Droit à la santé : 50 morts par « manque de moyens »
La pandémie a mis en avant deux dynamiques au sein du secteur sinistré de la santé. D’une part, le secteur public a montré toute sa centralité et sa pertinence et d’autre part, ce secteur a été dépassé par l’ampleur de cette crise sanitaire, notamment durant les pics de la 2ème vague et actuellement celui de la 3ème vague.
La mobilisation des (faibles) moyens du secteur de la santé publique pour faire face à la pandémie a eu pour effet de réduire les services offerts aux usagers souffrant d’autres pathologies. C’est le principal diagnostic de l’AMDH en termes de droits à la santé durant l’année 2020. « Les gens atteints de maladies chroniques ont été abandonnées car le ministère de la Santé a réservé tous les services et départements de base avec leurs équipements au profit des personnes atteints par le virus Corona, et a transféré les autres malades de force aux petits hôpitaux », explique l’AMDH.
Le rapport décrit en détail les difficultés d’accès aux soins durant cette période.
« Le ministère a affecté 50 établissements de santé avec tout leur personnel, sur un total de 149 établissements hospitaliers au Maroc pour l’épidémie de Corona, ce qui signifie qu’environ 99 établissements sont encore théoriquement ouverts à d’autres patients ; mais en réalité ce n’était pas le cas, car tous les hôpitaux sont devenus des lieux presque déserts, à quelques exceptions », peut-t-on lire dans ce document au ton critique. Conséquence de cette privation du droit à la santé : « 50 décès ont été enregistrés dans les hôpitaux, centres de santé et centres sociaux dus à des négligences et erreurs médicales, ou à cause du manque d’infrastructures hospitalières », regrette l’AMDH. A ces décès s’ajoutent ceux enregistrés dus à des piqûres de scorpion, morsures de serpents ou de chiens contractant la rage. En 2020, ils étaient 22 cas, des décès enregistrés en majorité en milieu rural.
Droit à l’éducation : 300 000 enfants perdus
Dans le contexte de la pandémie, l’AMDH alerte aussi sur la persistance de l’abandon scolaire. L’AMDH rappelle ces chiffres qui donnent froid au dos. « Le système éducatif au Maroc souffre toujours du fléau du décrochage scolaire qui menace les élèves, les statistiques officielles pour l’année 2019-2020 ont révélé que 304 545 garçons et filles ont quitté l’école sans perspective d’avenir, 52,8% d’entre eux dans le secondaire », rappelle l’AMDH
Les chiffres de l’année 2020-21 devrait s’annoncer à la hausse surtout depuis la mise en place de l’enseignent à distance qui a creusé les inégalités scolaires. L’AMDH conclut : « Ces mesures ont démontré les limites du système éducatif et ont révélé l’aggravation des discriminations et des inégalités d’accès à l’éducation qui existaient avant la pandémie. L’enseignement à distance a conduit à l’exclusion des groupes les plus marginalisés, en particulier les enfants issus de familles pauvres ou à faible revenu, les enfants des zones rurales, les filles et les enfants handicapés, les migrants, en particulier en situation irrégulière, les réfugiés et les demandeurs d’asile ».