Entre migrants et Marocains, Dialogue culturel à Farah Salam
Organic Knowledge est un projet qui a pour vocation de soutenir l’expression artistique des minorités et des jeunes dans les quartiers populaires. Reportage à Casablanca, où migrants et Marocains entament un dialogue interculturel.
C’est dans une « Eglise de maison », près du quartier Farah Salam à Casablanca que l’équipe de Minority Globe nous donne rendez-vous pour assister à leur atelier artistique interculturel. Les participants (trois marocains et quatre personnes originaires d’Afrique Subsaharienne) s’imprègnent de l’esprit de l’atelier pour retravailler les matériaux utilisés mais surtout recycler les idées reçues sur chacune des communautés.
Accès à la culture
« Notre approche est d’utiliser les outils artistiques pour trouver les moyens de permettre aux populations d’origines différentes de partager autour de la coexistence entre elles », nous explique Reuben Yemoh ODOI, directeur artistique de l’Association The Minority Globe. Cet atelier s’inscrit dans le cadre du projet Organic Knowledge (Savoir organique). « Nous avons créé des ateliers artistiques et participatifs à Casablanca et à Salé afin de soutenir l’expression artistique des minorités et de renforcer l’engagement citoyen dans leur quartier », souligne Yemoh.
« On souhaite montrer le Maroc des possibilités, et pas seulement le Maroc des problèmes ».
Reuben Yemoh ODOI, directeur artistique de l’Association The Minority Globe.
Le projet qui a été mené entre septembre et décembre 2021 a permis de créer deux projets artistiques participatifs et inclusifs, conçus par les habitants de quartiers populaires à Casablanca (Farah Salam, Hay Hassani, Hay Rahma, Riad Oulfa et Oukacha) et Salé (Abouab Salé). Les ateliers ont été animés par l’artiste autodidacte Ulrich Zouanda.
« Nous poursuivons trois objectifs : Valoriser la pratique artistique et l’engagement citoyen auprès de populations marginalisées, notamment des jeunes, favoriser un accès plus démocratique à la culture, en ciblant tout particulièrement les zones isolées et les groupes les moins favorisés de la population et enfin inciter à la diversité culturelle et au dialogue interculturel afin de construire de meilleures relations entre les communautés des quartiers cibles ». Des objectifs ambitieux qui s’appuient sur l’art pour briser les frontières linguistiques et culturelles.
« Le Maroc des possibilités »
Patricia est originaire de la Côte d’Ivoire, elle réside au Maroc depuis quatre ans. Pour elle cet atelier est une opportunité pour apprendre de nouvelles choses. « Depuis trois jours, j’apprends beaucoup de choses et surtout d’être autonome », confie-t-elle. A Salé, une participante déclare : « J’ai beaucoup appris auprès de mes frères et sœurs marocaines et subsahariennes. Je me sens plus à l’aise dans mon quartier car nous avons créé des liens sincères. J’aimerais continuer à pratiquer l’art. ».
« Quand, on m’a proposé cette expérience, j’ai vite accepté, c’était l’occasion de découvrir ces personnes africaines. Et la vie est faite d’expériences ».
Mohamed, participant à Organic Knowledge.
Mohamed résidant du quartier Hay Hassani est venu découvrir cet atelier de recyclage et de création : « Quand, on m’a proposé cette expérience, j’ai vite accepté, c’était l’occasion de découvrir ces personnes africaines. Et la vie est faite d’expériences. On travaille à partir de choses simples qui a priori n’ont pas d’importance, mais qu’on valorise ». Sur sa relation avec les personnes étrangères, il se contente d’affirmer qu’elle est « normale » et « qu’il n’y a pas de différences entre les populations » du quartier. Ces belles paroles de Mohamed ne peuvent dissimuler les tensions récurrentes entre la population locale et les nouveaux arrivants dans le quartier paupérisé de Farah Essalam. Des projets similaires tentent d’atténuer cette tension. « Notre mission est de prendre le temps de décortiquer les problèmes, les étudier et créer une discussion autour, avant de lancer le processus de création », rappelle Yemoh de Minority Globe.
Le projet avait démarré à Salé, en septembre. « Dans le quartier d’Abouab Salé, nous avons réuni un groupe de dix représentants afin de créer une œuvre collective pour parler des conditions de vie du quartier et valoriser les parcours et récits individuels des communautés locales et migrantes, qui bien qu’habitant à côté les uns des autres, ne se côtoient pas », insiste Yemoh de Minority Globe.
« J’ai beaucoup appris auprès de mes frères et sœurs marocaines et subsahariennes. Je me sens plus à l’aise dans mon quartier car nous avons créé des liens sincères ».
Fadila, participante à Organic Knowledge.
Organic Knowledge a été soutenu par l’Institut français de Casablanca et la Fondation Heinrich Böll-Rabat. L’atelier de Casablanca a donné lieu à une restitution publique sur la grande place du quartier. Patricia et Mohamed ont pu présenter les projets communs aux habitants du quartier. « A travers ces projets, on souhaite montrer le Maroc des possibilités, et pas seulement le Maroc des problèmes. Il s’agit de raconter à travers l’art des histoires de migrants disposant de solutions et pas seulement de ceux qui veulent partir » conclut le dynamique directeur artistique de Minority Globe qui se prépare déjà à la suite de ce cycle d’ateliers créatifs.
The Minority Globe en bref
The Minority Globe utilise la méthodologie artistique, la pratique culturelle et le rôle thérapeutique de l’art comme outils de réflexion, d’action et de plaidoyer sur les questions de la migration. Officiellement déclaré au Maroc en 2016, mais active depuis 2009. The Minority Globe agit en faveur des personnes invisibilisées et sous-représentées au sein de la collectivité telles que les femmes vulnérables, les mères célibataires, les jeunes précaires et les mineurs non-accompagnés.
Contacts :
Facebook : @AssociationTheMinorityGlobe
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