Immigration, le gouvernement interpellé sur les Cartes de séjour
Les conditions de renouvellement des cartes de séjour pour les étrangers installés au Maroc, deviennent encore plus strictes. Plusieurs organisations de défense des droits des immigrants interpellent le Chef du gouvernement, Aziz Akhanouch.
Pour cette nouvelle année, le mouvement associatif travaillant sur les questions migratoires craint que le scénario de l’an passé ne reproduise en matière de droit des personnes étrangères. Plusieurs organisations ont multiplié les sorties pour rappeler le gouvernement ses engagements.
Mémorandum et piqure de rappel
Parmi eux, le Collectif Papier Pour Tous, l’Organisation Démocratique du Travail – Immigré (ODT-I) et le Conseil des Migrants Subsahariens au Maroc (CMSM) qui ont adressé fin décembre un mémorandum au chef du gouvernement marocain, Aziz Akhannouch. Ce mémorandum souligne les doléances jugées « importantes et urgentes en faveur des personne migrantes installées au Maroc ».
Pour sa part, le GADEM rappelle aux nouveaux élus centraux et locaux, l’esprit de la Stratégie nationale d’immigration et d’asile (SNIA) adoptée en 2014 : « L’intégration socio-économique des personnes non ressortissantes marocaines est considérée comme un pilier central de cette politique. Les deux opérations exceptionnelles de régularisation de 2014 et de 2017, et les programmes définis dans le cadre de la SNIA adoptée symboliquement lors de la Journée internationale des migrants de 2014, étaient des messages forts. Ils ne doivent pas rester lettre morte ».
Trois dossiers sur la table
Dans leur mémorandum, Papiers pour tous, ODTI et CMSM, invitent le Chef du gouvernement « à œuvrer en vue de la simplification de la procédure d’octroi et de renouvellement des titres de séjours, pour tous les étrangers installés au Maroc ».
De son côté le GADEM s’inquiète des risques sur la pérennité d’un titre de séjour stable. Ces risques pèseraient sur l’accès à un travail formel dans des conditions dignes et de facto sur les chances dans l’intégration socio-économique. « Les dispositions de la loi n°02-03 (toujours en vigueur aujourd’hui malgré l’annonce d’une réforme en 2013) permettent très difficilement l’obtention et le renouvellement d’un titre de séjour, y compris pour les personnes ayant bénéficié d’une des deux opérations de régularisation ou répondant à des conditions d’accès au séjour prévues par la Convention internationale de protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille », insiste le GADEM.
Le GADEM s’inquiète des risques sur la pérennité d’un titre de séjour stable.
Le mémorandum des trois associations concerne aussi les droits socio-économiques. Aziz Akhnanouch est appelé à « adopter des mesures inclusives en faveur des migrants et réfugiés, qui respectent leurs droits économiques, sociaux et culturels et favorisent leur intégration économique et sociale, particulièrement pour les femmes et les enfants non-accompagnés », rappellent les trois organisations signataires. Ces structures demandent aussi l’inclusion de tous les étrangers établis au Maroc dans le chantier d’élargissement de la couverture médicale et sociale.
Même son de cloche du GADEM dans sa position datée du 18 décembre 2021, qui axe son intervention sur le niveau local : « Les besoins des personnes étrangères et migrantes dans l’accès aux services de base et de proximité s’expriment principalement au niveau local. Par conséquent, les collectivités territoriales ont elles aussi un rôle à jouer pour renforcer l’intégration des personnes étrangères dans le tissu économique local et dans les formations professionnelles. Elles ont également la responsabilité de l’accès à un logement digne, autre pierre angulaire d’une intégration effective. »
La SNIA en stand-by
Le troisième point du mémorandum Papiers pour Tous-ODTI-CMSM couvre le volet législatif prévu par la SNIA. Dans ce document, les signataires « appellent le Maroc à veiller à adopter, dans les meilleurs délais, la loi sur l’asile et celle sur l’immigration dont la promulgation a pris du retard depuis 2014, ainsi que de renforcer l’arsenal juridique par une loi spécifique contre toutes les formes de discriminations raciales ».
Les signataires « appellent le Maroc à veiller à adopter, dans les meilleurs délais, la loi sur l’asile et celle sur l’immigration »
ODT-I, Papiers pour tous et CMSM.
Enfin, ils rappellent que « ces doléances sont en droite en ligne avec la vision humaniste du Roi Mohammed VI en matière migratoire ainsi qu’avec les engagements internationaux du Maroc en la matière ». Malgré ces engagements nationaux et internationaux, le risque d’un effacement de ce dossier de l’agenda est bien réel ou bien leur déplacement vers des questions diplomatiques. Ce qui inquiète le GADEM : « Si les questions liées aux migrations se concentrent, aujourd’hui, beaucoup plus sur des enjeux politiques et diplomatiques entre les États, la protection des personnes qui ont fait le choix ou ont été poussé, voire forcé, à quitter leur pays d’origine, doit rester une priorité et ce, quelle que soit leur situation administrative relative à leur séjour, comme le rappelle la Convention internationale de protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. »
Il est à noter que la SNIA, adoptée en 2014, devait permettre d’élargir la couverture médicale aux personnes étrangères et adopter un nouvel arsenal juridique relatif à l’immigration, l’asile et les discriminations. Des chantiers aujourd’hui à l’arrêt.