Marché du travail: Femmes et jeunes bottés en touche
«Le marché du travail marocain, profondément inégalitaire, est le reflet des insuffisances de la trajectoire de croissance actuelle et d’une société peu inclusive, qui marginalise femmes et jeunes». C’est la conclusion principale d’une étude réalisée par Oxfam Maroc, intitulée: «Marché du travail au Maroc: Défis structurels et pistes de réforme pour réduire les inégalités». Les détails.
Selon cette étude, la croissance de la population en âge de travailler n’a pas été absorbée par les créations d’emplois qui demeurent insuffisantes. Sur ce point, il faut signaler qu’entre 2000 et 2020 la population marocaine a augmenté de 7,7 millions de personnes. Ce qui représente une hausse annuelle moyenne de 383.400 personnes.
Au regard de la pyramide des âges, la population en âge de travailler a augmenté de 7,5 millions de personnes, correspondant à une hausse moyenne d’environ 370.000 personnes. En clair, chaque année, entre 2000 et 2020, près de 370.000 Marocains ont eu l’âge d’entrer sur le marché du travail. Mais, seulement un quart (c’est-à-dire 88.000 personnes, soit 23,5%) de cette cohorte rejoignait effectivement le marché du travail en étant considéré comme actif. En effet, une grande partie des Marocains se trouvent sans emploi, car il n’en a pas été créé. Elle cherche et elle cherche mais ne trouve pas d’opportunités et finit par se décourager.
Seulement une femme sur cinq participe au marché du travail
Dans cette configuration du marché du travail marocain, la femme reste largement marginalisée. Selon l’étude, le taux d’activité des femmes est près de 50 points inférieur à celui des hommes dont la participation est en ligne avec celle des économies avancées. Ce qui veut dire que seulement une femme sur cinq (21,5% à fin 2019) participe au marché du travail, contre 71% des hommes.
L’étude recommande à ce niveau d’adopter une approche multifactorielle: intégrer les femmes et le mouvement féministe dans l’élaboration et l’évaluation des politiques de l’emploi, développer un service public de la garde d’enfants, aménager les horaires de travail pour rendre compatibles vie professionnelle et vie personnelle, accompagner le changement des mentalités pour rééquilibrer les rôles respectifs des femmes et des hommes dans la société, inciter à l’embauche des femmes, ce qui peut passer par des mécanismes de discrimination positive en réduisant notamment le coût pour les employeurs (réduction de cotisations, prise en charge d’une partie du salaire…)
28% des jeunes écartés de l’emploi et de l’école
L’autre catégorie soufrant de la précarité du marché du travail est celle des jeunes, notamment les citadins. Ces derniers font face à un chômage massif en dépit de l’allongement progressif de la scolarisation. Au sein des 15-24 ans, le taux de chômage concerne près d’un jeune sur 4 (24% en 2019) et suit une tendance haussière ces dernières années. Le chômage des 25-34 ans est également plus élevé que celui du reste de la population puisqu’il touche environ 15% de la population active de cette tranche d’âge.
Conséquence: « Le Maroc est l’un des pays de la région MENA les plus touchés par le phénomène des NEET (Not in Education, Employment or Training) ». En 2018, 28% des 15-24 ans étaient considérés comme NEET, soit environ 1,7 million de personnes ne se trouvant ni à l’emploi, ni en enseignement, ni en formation. «Les femmes sont bien plus touchées que les hommes, puisque 44,1% des femmes de 15-24 ans sont considérées comme NEET, contre 13,3% des hommes», précise l’étude. Ces jeunes, qui ont quitté l’école trop tôt, à cause de la défaillance du système éducatif marocain, doivent pouvoir bénéficier d’une formation professionnelle de qualité qui permet leur intégration dans le marché du travail.