Crédit Photos : ATTAC Maroc
Idées, Luttes des Idées

ATTAC décrypte « le Maroc social » de 2022

ATTAC Maroc a organisé son septième congrès à Rabat les 16, 17 et 18 décembre sous le slogan : « Continuons notre contribution pour construire les résistances pour la liberté et la justice sociale et environnementale ».  Au terme de ce rendez-vous organisationnel, cette ONG livre sa lecture de la situation socio-économique d’une perspective internationale et régionale.

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Lors de ce congrès, les membres de cette association membre du Comité pour l’abolition des dettes illégitimes (CADTM), ont discuté de la situation politique, économique et sociale au Maroc et dans le monde. Cette analyse peut être résumée dans six axes : le contexte international et son effet sur le Maroc, la logique marchande dans le monde, rôle du Fonds monétaire international (FMI) dans la région MENA et au Maroc, accaparement des richesses au niveau national, le pouvoir d’achat des classes populaires et la situation d’endettement et le service de la dette.

Contexte international

Selon ATTAC Maroc, « la pandémie de Covid a aggravé la crise déjà profonde du mode de production capitaliste. C’est une crise multidimensionnelle : économique, financière, alimentaire, environnementale, politique et migratoire avec des guerres et du terrorisme », analyse cette ONG créée en 2001. A cet égard, la crise environnementale qui dévaste le climat, la nature et la biodiversité « constitue une menace pour l’existence de l’humanité et de la planète entière », prévient ATTAC.

Cette ONG pointe du danger l’impérialisme russe et américain et les dangers d’une guerre nucléaire. « La stratégie d’intervention des impérialismes dans les régions d’Asie, d’Afrique et d’Europe de l’Est conduit à l’expansion des guerres et de l’armement, ce qui laisse présager le danger d’une guerre mondiale qui sera désastreuse pour l’humanité et la planète. Cela se manifeste, d’une part, dans l’invasion de l’Ukraine par l’impérialisme russe, et d’autre part, dans l’élargissement de l’OTAN sous l’hégémonie des USA pour atteindre les objectifs géopolitiques de l’impérialisme occidental avec une augmentation massive des budgets militaires », décrypte ATTAC.

Généralisation de la logique du marché

Dans ce contexte, « les guerres commerciales renforcent le pouvoir des multinationales qui imposent la suppression de toutes les barrières à la circulation de marchandises et de capitaux afin de piller les richesses des peuples, notamment dans les pays pauvres du Sud Global. La dette constitue l’un des principaux mécanismes de ce pillage qui accompagne l’expansion de la domination du capital financier », poursuit ATTAC.

« La classe ouvrière, les petits producteurs les couches populaires des pays du Sud comme du Nord
supportent le fardeau des crises capitaliste ».

Dans une telle situation, « la classe ouvrière, les petit·es producteur·ices et les couches populaires des pays du Sud comme du Nord supportent le fardeau de ces différentes crises capitalistes, qui touchent en premier lieu les femmes et les jeunes, par la généralisation de la logique du marché et du profit dans tous les aspects des activités humaines, et par la destruction des droits économiques, sociaux, civils et politiques », prévient l’association présidée par Omar Aziki.

Rôle contre-productif du FMI dans le Sud

« Le Fonds monétaire international et la Banque mondiale constituent « les principales composantes de la contre-révolution dans la région »

En Afrique du Nord et Moyen-Orient / région arabe, « la crise sanitaire et la guerre contre l’Ukraine ont exacerbé les conditions économiques et sociales contre lesquelles les peuples de la région se sont révoltés depuis 2011, en plus de leur opposition à l’entité sioniste occupant les terres du peuple palestinien », précise ATTAC.

Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale constituent « les principales composantes de la contre-révolution dans la région, à travers des accords d’emprunt drastiques, comme ceux imposés au peuple libanais plongé dans une crise alimentaire aiguë, à l’Égypte, à la Tunisie, Jordanie et autres pays de la région », explique ATTAC. Les termes de ces prêts consistent « à garantir les conditions pour stimuler les investissements privés, accorder des avantages fiscaux aux grandes entreprises, supprimer le système de subvention aux produits alimentaires et énergétiques, réduire les salaires et augmenter l’âge de la retraite. Cela conduira à une accentuation de la baisse des revenus des couches populaires et à la détérioration du pouvoir d’achat. Cela provoquera une hausse de la pauvreté, du chômage et une généralisation de la précarisation et de l’instabilité des conditions de vie », estime ATTAC Maroc.

Situation au Maroc : Accaparement et autoritarisme

« Le NMD est basé sur l’élargissement des possibilités de concentration de la richesse entre les mains
d’une minorité capitaliste ».

Au Maroc, l’Etat a utilisé selon ATTAC « la pandémie pour consolider le despotisme politique et les politiques néolibérales. Le « nouveau modèle de développement » est basée sur l’élargissement des possibilités de concentration de la richesse entre les mains d’une minorité capitaliste locale qui partage avec des multinationales des parts dans l’accaparement de terres, des eaux, des ressources maritimes et minières, de services publics et d’autres domaines. Le caractère despotique du régime constitue un pilier majeur de cette grande accumulation capitaliste, qui n’est plus absorbée par le marché local, et a commencé à pénétrer les pays du continent africain », estime ATTAC Maroc.

« Le « Plan Maroc Vert » a drainé, pendant dix ans, un budget colossal pour soutenir les grands exportateurs du secteur agricole »

La guerre contre l’Ukraine a exacerbé la crise structurelle alimentaire et énergétique de notre pays et la hausse exponentielle des prix qui en a résulté. « Le « Plan Maroc Vert » a drainé, pendant dix ans, un budget colossal pour soutenir les grands exportateurs du secteur agricole, alors que les importations de céréales, de légumineuses, d’oléagineux et de sucre augmentaient. Il y a actuellement une pénurie de lait et de ses dérivés, qui sera également couverte par les importations. Le secteur de la pêche, à son tour, subit un épuisement majeur, une minorité accapare la richesse halieutique pour l’exporter », rappelle ATTAC.

Baisse du pouvoir d’achat : Oligopole des hydrocarbures

L’État a totalement supprimé les subventions sur les matières énergétiques (essence, diesel et fioul) fin 2015. Cela a conduit à doubler le prix du litre de gasoil, qui oscille actuellement entre 15 et 16 dirhams (environ 1,45 euros et 1,55 euros). « Les sociétés de distribution des hydrocarbures ont accumulé des bénéfices de plus de 45 milliards de dirhams (environ 4,4 milliards d’euros) depuis la libéralisation des prix des produits énergiques jusqu’à fin 2021. La facture de ces bénéfices est payée par les consommateurs/trices, soit directement à la pompe, soit indirectement à travers les augmentations générales de prix », critique ATTAC.

« Les ménages populaires s’endettent fortement et sont asphyxiées notamment par les institutions de microcrédit »

La détérioration du pouvoir d’achat s’est aggravée parallèlement à la baisse des revenus et à la faiblesse des salaires. « Les ménages populaires s’endettent fortement et sont asphyxiées notamment par les institutions de microcrédit qui accumulent, elles aussi, d’importants profits sur le dos des pauvres. L’État veut supprimer ce qui reste de la caisse de compensation, notamment les subventions au gaz butane. Il s’apprête également à relever l’âge de la retraite à 65 ans et à réduire la pension de retraite des ouvrier·e·s du secteur privé, en réformant la Caisse nationale de sécurité sociale et en généralisant le système contractuel dans la fonction publique », estime ATTAC Maroc.

Endettement et service de la dette

Le pays est entré dans une nouvelle spirale d’endettement en supprimant le plafond fixe pour les emprunts à l’étranger. « L’encours de la dette publique totale a doublé de 2011 à 2020 et atteint 96% du PIB ». L’État tient d’abord à remplir ses obligations envers les institutions financières internationales pour assurer le paiement de la dette et obtenir d’autres emprunts. Il attend actuellement l’approbation du FMI pour la ligne de précaution de liquidité ou la ligne de crédit modulable, ce qui pourrait lui permettre d’obtenir des prêts sur le marché financier international », indique ATTAC, membre du CADTM

« Le service de la dette est l’équivalent de 9 fois le budget de la santé ».

Pour rappel, la part des créanciers privés dans la dette publique extérieure est passée de 9% en 2011 à 28% en 2021. Les paiements de la dette publique totale (service de la dette) se sont élevés à 172 milliards de dirhams à fin 2021, soit l’équivalent de 9 fois le budget de la santé.

« Toutes ces mesures alimentent les conditions d’une explosion sociale probable dans notre pays. Le régime mène une répression préventive contre les formes de protestation et de manifestation, restreint le droit de grève, criminalise toutes les formes d’expression et harcèle toute voix critique », conclut ATTAC Maroc.

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