ROSAMOR…Quinze ans après
ENASS revient dans son dossier annuel « Luttes ouvrières » à l’occasion du 1er Mai sur les réalités de la santé et sécurité au travail.
Il y a quinze ans, la classe ouvrière a été meurtrie par l’effroyable drame de l’usine de textile de ROSAMOR à Casablanca. En avril 2008, au sein de cette unité de la Zone industrielle de Lissasfa, 56 ouvriers perdent la vie dans des conditions effroyables, dans l’incendie de cette usine aux portes fermées par le patron. Une décennie et demie est un temps suffisant pour faire le bilan de la santé et de la sécurité de travail au Maroc.
Le premier bilan proposé par ENASS dans son dossier annuel « Luttes ouvrières » à l’occasion du 1er Mai nous montre que peu de choses ont été effectivement réalisées pour protéger la vie des travailleurs à l’usine, à la ferme agricole, sur le chantier de construction, sur le navire de pêche, la carrière ou la mine.
Premier élément pour faire ce bilan, le chantier législatif. Le constat officiel est sans appel. L’élaboration du projet de loi-cadre sur la santé et sécurité n’a pas pu aboutir depuis 10 ans. Un texte qui traîne. Une meilleure protection pour les travailleurs qui tarde à voir le jour.
Deuxième élément de ce bilan, l’efficacité de l’action gouvernementale dans ce domaine. Sur le plan du travail de l’Exécutif (ministère de l’Emploi), les différents acteurs (médecins du travail, inspecteurs du travail, etc.) sont faibles en nombre pour assurer le suivi de la situation des travailleurs. Plus que ça, les Marocains ne disposent pas d’une photographie mise à jour de la réalité des accidents de travail et des décès sur les lieux de travail. Les chiffres actualisés sur les morts au travail sont-ils un tabou de plus ?
Troisième élément du bilan, c’est le niveau de responsabilité politique des gouvernements face à l’hécatombe des morts au travail. Fin mars, 10 ouvrières agricoles perdent la vie lors de leur transport de la ferme vers leur domicile. Face à ce drame, un silence assourdissant du gouvernement. Pas un mot du ministère de l’Emploi. Pas une phrase de la part des différents responsables locaux, régionaux et nationaux. Des médias se contentent de réduire ces morts à répétition en simple fait divers « où des femmes ont fait un accident de la circulation ».
Ce type de drames est invisibilisé. L’acteur politique est déresponsabilisé. Pourtant, nous sommes face à des crimes commis de manière préméditée par le Capital, protégés par un gouvernement, membre actif du patronat. Un système de quasi-impunité est aujourd’hui mis en place face aux accidents de travail. Le drame de l’usine de la mort de Tanger nous le prouve. 28 morts noyés par le capitalisme du désastre. Aucune condamnation pénale. Aucune poursuite à l’encontre des acteurs publics.
Ce système d’impunité est aujourd’hui bien rôdé pour protéger les auteurs des crimes contre les travailleurs. Ce système continue à protéger par exemple, la féodalité agricole à Chtouka Ait Baha ou au Gharb. Un secteur qui fait une centaine de morts par an, sans jamais être inquiété. Rosamor hier, Tanger aujourd’hui : Ouvriers, ouvrières agricoles femmes, travailleurs migrants, enfants exploités, continuent à perdre leur vie dans ces lieux de la mort…Jusqu’à quand ?
je partage entièrement votre analyse, mais il faut citer également le texte sur les établissements classés de 1914, que tous les gouvernement n’ont pas pu amender à ce jour, malgré ses lacunes flagrantes.