À Nador, Un Forum pour dénoncer les politiques migratoires
Le Forum social maghrébin des migrations (FSMM) tient sa 5ème édition à Nador du 23 au 25 juin 2023. La commémoration des tragiques évènements de Nador-Melilla sera au cœur des discussions.
C’est une édition spéciale du Forum social maghrébin des migrations (FSMM) qui s’ouvre à partir demain, le 23 juin 2023 à Nador. C’est dans cette ville-symbole de l’externalisation des frontières et de la permanence du contexte coloniale, que des ONG, activistes, chercheurs, mouvements des familles des disparus se donnent rendez-vous pour les trois prochains jours. La ville marocaine située au Nord-est est aussi le témoin du plus grand crime migratoire aux frontières de l’Europe, la tragédie de Nador-Mellila du 24 juin 2022. Pour ces raisons, le FSMM tient cette nouvelle édition de son activité dans cette ville méditerranéenne et africaine, quadrillée par les frontières européennes.
Le thème : « Plus jamais : El Barrio chino : Pour un Maghreb libre de toute haine, xénophobie et racisme ».
Cette édition fait une place de choix pour des débats sur la montée du racisme et de la xénophobie au Maghreb, depuis les malheureuses déclarations du président du Kais Said. Lors de ces trois jours, plénières (3), ateliers (7) et activités artistiques sont prévus sous le thème : « Plus jamais : El Barrio chino : Pour un Maghreb libre de toute haine, xénophobie et racisme ».
Contre « le tout sécuritaire »
Nador cette ville-symbole de l’externalisation des frontières de l’UE.
« Depuis plus de trois décennies, les politiques migratoires des États du Nord, mais aussi de ceux du Sud, se sont durcies, principalement axées sur les restrictions, la répression et le tout-‐sécuritaire. Dans de nombreux pays, s’ils ne sont pas rejetés, des migrant(e)s, y compris des enfants, se retrouvent dans des prisons. A cette répression s’ajoutent la criminalisation de la solidarité, l’enfermement illégal des migrant(e)s et les atteintes à leurs droits à la vie et à l’intégrité physique », rappellent les organisateurs dans la note conceptuelle de cette édition du FSMM.
Dans ce document, le FSMM rappelle que « les règles sécuritaires sont devenues systématiques dans la gestion des flux migratoires. Le passage des frontières par des voies légales est rendu de plus en plus difficile, particulièrement avec le déploiement de plusieurs mécanismes de contrôle (Frontex, Europol…). L’instauration de ces politiques est imposée par les États du Nord aux gouvernements du Sud comme préliminaire à tout accord dans la quasi-‐totalité des négociations ».
Pour les FSMM, les pays du Maghreb subissent et appliquent ces politiques migratoires. « La quasi-totalité des accords d’associations, depuis la fin des années 1990, a été conditionnée par la politique sécuritaire et par l’implication des gouvernements dans le rôle de gendarmes des frontières », insiste le FSMM. Ce contexte a produit de multiples drames au Maghreb, frontière de l’Europe.
Visas et chantage
Le FSMM rappelle bien sûr « Les événements tragiques et le traitement particulièrement cruel, inhumain et dégradant subi par les migrant(e)s le 24 juin 2022 au poste frontalier de Barrio Chino, entre Nador et Melilla ». Dans la note où le FSMM fait le diagnostic des politiques migratoires souligne sur l’effet de la pandémie sur les migrants. « Depuis 2020, la pandémie du Covid a eu un impact négatif sur toutes les populations de la région et qui a pesé encore plus lourdement sur les populations les plus défavorisées, parmi lesquelles les migrants », alerte cette large coalition associative et syndicale.
Le FSMM signale aussi la politique des visas des pays de l’UE. « Les restrictions draconiennes appliquées par les pays de la zone Schengen à l’encontre de tous les citoyen(ne)s du Maghreb, restreignant de manière drastique et arbitraire même la circulation prétendument « sûre et ordonnée » ;
Cette coalition ne manque pas pointer du doigt le chantage de part et d’autre autour des enjeux migratoires : « les politiques migratoires des pouvoirs maghrébins à la recherche de conventions bilatérales et/ou multilatérales avec les gouvernements et l’UE, utilisant les migrant(e)s comme monnaie d’échange », affirme le FSMM.
Pour rappel, le Forum social maghrébin organise, depuis 2010, un forum dédié aux migrations. Quatre éditions se sont tenues, respectivement, à Bruxelles (2010), Oujda (2012), Monastir (2014) et Tanger (2016). En 2018, ce forum a été inclus dans la rencontre du People Global Action (PGA), qui a eu lieu à Marrakech, en marge des discussions des Nations unies sur le Pacte mondial sur les migrations. En 2020, la session du Tribunal permanent des peuples devait se dérouler à Tunis sur les politiques migratoires au Maghreb, mais, malheureusement, la pandémie du Covid 19 a bloqué cette activité ainsi que tant d’autres.