À Ouled Ziane, sous les cendres la colère
Le nouveau camp de migrants d’Ouled Ziane n’a duré que quatre mois. Au matin du 3 août, il a pris feu à nouveau. Reportage.
Texte : Salaheddine Lemaizi / Videos et photos : Anas Laghnadi
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« Notre présence ici à Casablanca n’a pas de sens. Nous voulons partir en forêt pour poursuivre notre chemin ».
« J’ai tout perdu, papiers, téléphone, vêtements. Tout est parti en fumée », nous déclare Saliou Dialou, migrant originaire de la Guinée Conakry, vivant dans ce camp depuis trois mois. « J’ai eu juste le temps de sortir mon fils d’un an et ma femme marocaine qui vivaient avec moi au camp. J’ai tout laissé », se console malgré tout Adama, également originaire de la Guinée et un des leaders de cette communauté. « Notre présence ici à Casablanca n’a pas de sens. Nous voulons partir en forêt pour poursuivre notre chemin », crie Madan Sollickou, de la Guinée.
Les migrants nettoient les lieux et tentent de reconstruire avec l’énergie du désespoir.
C’est dans cette ambiance de désolation et de colère que les centaines de migrants observent les cendres de ce qui était leur refuge temporaire depuis quatre mois. Après le feu, les groupes de migrants tentent de nettoyer les lieux et reconstruire avec l’énergie du désespoir. Une reconstruction sous étroite présence des forces de l’ordre.
Absence de tout soutien humanitaire de la part des pouvoirs publics ou des ONG.
Comme à l’accoutumée dans le cas d’Ouled Ziane, nous avons noté l’absence de tout soutien humanitaire de la part des pouvoirs publics ou des ONG à la suite de ces incendies.
Les faits
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Selon les autorités locales et plusieurs témoins vivant dans le camp, à 6h du matin un feu s’est déclaré depuis les grillages autour de l’espace Beggar sur le boulevard des Ouled Ziane. Les migrants avaient élu domicile depuis mars dernier dans ce lieu. « Je pense que c’est un des SDF marocains qui a mis le feu de manière volontaire », avance un migrant rencontré sur place. Un avis qui n’est pas partagé avec les autres migrants sur place. « On ne peut pas dire précisément qui est à l’origine de ce feu. On sait que le départ du feu provient des grillages extérieurs. Et puis le feu s’est rapidement propagé sur le camp », botte en touche un migrant malien avec prudence.
Dans un communiqué, la préfecture des arrondissements d’Al Fida-Mers Sultan a indiqué que « dès que le feu s’est déclaré à 6h du matin environ, les autorités locales, les services de sécurité et la Protection civile se sont déplacés rapidement sur les lieux. Le feu a été maîtrisé à 8h du matin, sans enregistrer de pertes humaines. Seul un migrant a été blessé légèrement et il a été transporté vers l’Hôpital Bouafi pour recevoir les soins nécessaires », peut-on lire dans cette déclaration. Et d’annoncer qu’une « enquête a été ouverte pour connaître les circonstances de cet incident ».
Le camp des migrants de 2023 a été constitué en mars 2023, à la veille de la visite royale à Casablanca. Les migrants ont été officieusement autorisés à se déplacer à l’espace Beggar pour pouvoir libérer la plateforme du tramway où ils vivaient depuis des mois de l’année 2022 et 2023. Une situation qui avait produit des heurts entre migrants et riverains d’un côté, et migrants et autorités de l’autre. Selon un représentant des autorités locales sur place, « le camp actuel compte 800 personnes environ ». Autour de la gare, d’autres petits regroupements de migrants existent.
Le camp des migrants existe de manière intermittente depuis 2015.
À noter que le camp des migrants existe de manière intermittente depuis 2015. Plusieurs feux se sont déclarés dans ce quartier, le plus important a eu lieu en 2017. La présence des migrants en centaine dans l’espace urbain casablancais est la conséquence du renforcement des contrôles au niveau des villes frontalières du nord du pays (Nador, Tétouan et M’diq).