Idées, Luttes des Idées, UNE

Quand la Géographie trace le destin de l’Homme

* Par Fatiha AAROUR

Ce chapitre offre un aperçu global de la topographie et de l’Histoire d’Aït Hkem. Il propose une exploration du paysage de cette confédération en mettant en avant ses caractéristiques géographiques qui ont façonné la vie de sa population au fil du temps. De plus, il synthétise sa relation avec le pouvoir central, de l’époque du siba jusqu’à nos jours.

Forêt Tighza. Crédit photo : Fatiha AAROUR

Aït Hkem est un regroupement de tribus situé au pied du Moyen Atlas, à environ 100 kilomètres au sud-ouest de Rabat et à 160 kilomètres au sud-est de Fès. Cette confédération, autrefois désignée sous le nom de « Beni Hakem-Tedders » à l’époque du protectorat français, fait partie de la province de Zemmour-Khémisset, intégrée à la région Rabat-Salé-Kénitra.

Les tribus d’Aït Hkem sont dispersées autour du petit village de Tiddas, implanté entre Mâaziz et Oulmès. Ce bourg a été établi officiellement par les autorités du protectorat français au début du siècle dernier. En effet, la Résidence Générale au Maroc avait mis en place plusieurs postes, dont Tiddas faisait partie, pour le but de contrôler le Moyen Atlas et ses environs. Aujourd’hui, Tiddas constitue le cœur économique et administratif d’Aït Hkem, jouant ainsi un rôle essentiel dans la région.
Cette zone géographique partage des frontières au sud avec le village de Mâaziz, à l’ouest avec la grande tribu Aït Ikkou, à l’est avec Âin Sbit, et au nord avec Moulay Bouâzza et Oulmès. Sa population totale est d’environ 10 047 habitants, répartis entre le centre urbain de Tiddas qui compte environ 3 520 habitants (soit 35 % de la population), et le milieu rural avec 6 527 habitants (soit 65 %).
Le territoire d’Aït Hkem s’étend sur une superficie d’environ 58 km² (soit 5800 hectares), avec une surface forestière de 144 000 m². La région présente une altitude moyenne d’environ 500 mètres. Son climat est de type semi-aride dans la plaine et subhumide à humide en montagne.

Les températures moyennes oscillent généralement entre 15 et 17°C. L’amplitude thermique entre les températures maximales et minimales augmente en général avec l’éloignement des côtes (continentalité). Les mois les plus chauds sont juillet et août, où la température moyenne varie entre 30 et 35°C dans la plaine, tandis qu’en montagne, elle se situe entre 28 et 32°C. Les mois les plus froids sont décembre, janvier et février, avec une température moyenne de 2 à 6°C dans la plaine et de -4 à 2°C en montagne.

La région est bien pourvue en stations pluviométriques, dont une dizaine ont été repérées. Parmi celles-ci, les stations TSALAT et SIDI AMAR qui sont les plus intéressantes pour spécifier son climat en raison de leur proximité. La pluviométrie moyenne interannuelle varie entre 325 et 700 millimètres, avec une moyenne d’environ 475 millimètres.

Le territoire est situé dans le domaine mésétien, englobant à la fois des plaines, des plateaux et des massifs d’altitudes généralement modérées. Le socle de ce domaine incluant la région d’Aït Hkem se divise en trois ensembles, s’étendant du nord-ouest
au sud-est, comme suit :

  • Le Massif Central, qui englobe la région d’Aït Hkem Tiddas.
  • La méséta côtière septentrionale.
  • Le Massif des Rehmna, la méséta côtière méridionale, la chaîne des Jbilet et
    la partie nord-ouest du Haouz.

La composition géologique principale de la région consiste en des schistes fins et des grès-quartzites datant du paléozoïque, spécifiquement de l’Ordovicien au Carbonifère. Ces formations géologiques présentent une variabilité de plissements et sont séparées par des zones de faille. On y trouve également des intrusions magmatiques.

Aït Hkem bénéficie de la richesse de ses forêts montagneuses, en particulier celles de Tizra, Tighza et Harcha, qui servent de pâturages pour les éleveurs de bétail. De plus, le territoire est traversé par deux fleuves principaux : Bou Regrag et Ouad Ben Selam.

Le fleuve Bou Regrag est formé par la convergence de deux cours d’eau, Ouad Kisiksou et Oued Aguennour, qui coulent à travers les régions de Zaër, Shoul et Hsein, pour ensuite se jeter dans l’océan Atlantique entre Rabat et Salé.

Quant à Ouad Ben Selam, il est constitué par plusieurs rivières issues des pentes de Djbel Hdid et du massif de Mouchchen, notamment Oued Hamran et Oued Bou Mellal. Ce fleuve est alimenté sur sa gauche par les eaux du plateau de Tiddas (Msaben) et suit son cours dans le bassin qui sépare les Aït Mhammed des Aït Bouguemal.

Ces ressources naturelles, comprenant les forêts de montagne et les rivières, ont un rôle crucial dans la vie quotidienne et les activités économiques de cette communauté, en fournissant des pâturages pour le bétail et en contribuant à l’irrigation et aux besoins en eau.

Quant à la population, cette confédération est composée des tribus principales suivantes : Mchichita, Aït Zoulit, Aït Baboud, Aït Zaghou, Aït Bouguemal, Aït Boumeksa, Aït Bou-Hakki, Aït Mhammed, Aït Bouzit, et Aït Alla. Les Hkmaouites se perçoivent comme une entité indépendante au sein de leur voisinage. Cependant, dans la réalité concrète, ils sont généralement reconnus comme faisant partie intégrante du grand groupement berbère Zemmour.

Par ailleurs, Marcel Lesne classe Aït Hkem parmi les huit grandes tribus de la sous- confédération Zemmouries de l’époque. Tout en les situant au sein de cet ensemble plus large, l’auteur met également en évidence les particularités qui font des Hkmaouites une entité distincte et remarquable au sein du groupement. Cette reconnaissance de leur identité unique témoigne de leur importance et de leur rôle
au sein du contexte tribal plus vaste.

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Dans son travail intitulé Les Zemmour : Essai d’Histoire tribale, Lesne explique que « Sans rechercher d’hypothétiques comparaisons avec les tribus Zemmour que nous connaissons aujourd’hui, constatons simplement l’existence de deux sous-groupes distincts, et l’importance des Bni-Hakem dans cet ensemble. Et à ce propos, il est remarquable de constater que les auteurs marocains citent toujours Zemmour et Bni- Hakem, mettant ainsi en relief le caractère particulier de ce dernier groupement ».

Origines ethniques

Village de Tiddas.

Les références historiques relatives à la confédération Aït Hkem demeurent limitées. Selon Mouloud Achak, historien spécialiste des Zemmour et des Aït Hkem qui m’a accompagné sur le terrain, les Hkmaouites, identifiés en tant que Berbères, auraient migré du Haut Atlas au 16 e siècle en raison d’une sécheresse dévastatrice.

À l’heure actuelle, une communauté connue sous le nom d’Aït Hakim est établie à Aït Bouguemez (Haut Atlas). Cependant, aucune source Historique ne fait état d’un lien établi entre ces deux groupes, ce qui suscite un besoin accru de recherches afin de mieux appréhender l’origine et l’histoire de la confédération Aït Hkem, ainsi que de son éventuelle interrelation avec d’autres groupes berbères du Haut Atlas.

En intégrant les Aït Hkem à la confédération Zemmour, Marcel Lesne fait remarquer que la tradition n’a pas conservé de souvenirs précis sur les origines de chaque composante de Zemmour. À ce sujet, il souligne que même Ibn Khaldoun ne fournit aucun secours dans la recherche de références historiques valorisant les Zemmour : « Ibn Khaldoun ne nous est non plus d’aucun secours dans la recherche de lettres de noblesse pour les Zemmour, mais il est probable qu’ils seraient des descendant de Zemmer, fils d’Aurîgh, lui-même fils de Magher, fils de Bernés, fils de Berr. Dans ce cas les Zemmouris pourraient appartenir à la branche des Berbères Branès. Ibn Khaldoun cite des Bni Zemmor, parmi les Nefouça, habitant aux environs de Tripoli ; les Nefouça, descendants de Nefous, fils de Zeddjik, fils de Madghis-el-Abter, fils de Berr relèvent de la branche des Berbères Botr ».

Marcel Lesne adopte une attitude prudente à cet égard, soulignant que les indications historiques les plus anciennes sont peu claires et ne permettent pas d’établir une continuité avec les époques plus récentes. Par conséquent, élaborer une hypothèse solide sur les origines des différentes composantes de la confédération Zemmour devient une tâche difficile. Les lacunes dans les sources historiques rendent la
recherche sur ce sujet complexe et incertaine.

Ainsi, il est suggéré que le noyau central des Zemmour, auquel les Aït Hkem ont toujours été affiliés, occupait autrefois le territoire actuel des Beni Mguild dans le Moyen Atlas. Ces tribus étaient fragmentées en quatre groupements principaux : les Aït Zekri, les Msghra, les Houderran et les Aït Hkem. Il semble qu’elles aient graduellement reculé devant l’avancée des Aït Mguild, et ce n’est qu’à partir de 1843 que les historiens font mention de leur présence sur le territoire actuel.
En outre, Lesne rapporte une légende plus répandue selon laquelle les Zemmour descendraient de cinq frères, tous fils d’un certain Aïssa. Chaque frère aurait établi une tribu dont les descendants se considèrent comme héritière de cet ancêtre commun :

  • Lahsene-ou-Aïssa (Aït-Abbou)
  • Belkassem-ou-Aïssa (Aït Belkassem)
  • Houder-ou-Aïssa (Hauderran)
  • Mimoun-ou-Aïssa (Aït Mimoun)
  • Haddou-ou-Aïssa, également connu sous les noms de Harami ou Messarhani-
    ou-Aïssa (les Messarhra).

Ainsi, les cinq frères, toujours en désaccord, auraient pris des chemins séparés, et leurs familles et tribus auraient adopté le nom de chacun d’eux au lieu de s’unir sous un seul nom tel que « Aït-Aïssa ». Cette légende explique l’origine de la diversité tribale au sein des Zemmour et comment chaque groupe s’est identifié en se référant à l’un des cinq frères fondateurs.
Les autres tribus, telles que les Kabliyine, les Aït-Ouribele, ainsi que les Aït Hkem et les Bni-Ameur, ont également été intégrées aux Zemmour, mais plus tardivement que les cinq groupes initiaux. Marcel Lesne remarque que bien que la légende évoquée puisse être considérée comme une tentative d’explication, elle indique néanmoins l’existence d’un noyau authentique et la venue ultérieure d’autres tribus dans le groupement Zemmour. Elle témoigne aussi de l’incorporation tardive des ensembles tribaux d’Aït Hkem et des Bni-Ameur dans cette confédération.
Il est évident qu’Aït Hkem n’est pas une entité homogène, car des personnes étrangères ont été intégrées à ce groupe. Fréquemment, des individus originaires des régions de Chaouïa, Sraghna, Doukkala et Abda quittaient les terres sous le contrôle du bled el-makhzen (l’administration du sultan) pour chercher refuge dans les régions du bled siba (territoire non soumis au makhzen), dont Aït Hkem et Zemmour faisaient partie. Les raisons qui poussaient ces individus à chercher l’asile dans d’autres tribus étaient variées : cela pouvait être dû aux abus des caïds (représentants du makhzen) ou à la crainte de représailles suite à un crime commis au sein de leur propre groupe. En conséquence, Aït Hkem a accueilli de nouveaux membres venant de diverses régions, contribuant ainsi sa diversité.
Les chorfa d’Aït Alla et les Aït Bou-Hakki ont rejoint Aït Hkem depuis un lointain passé. Les Aït Bou-Hakki prétendent être d’origine arabe, mais cette affirmation semble principalement reposer sur des liens spirituels et linguistiques particuliers qui les distinguent des autres factions. Ils entretiennent des relations étroites avec les Bni Khirane, une tribu arabophone des environs d’Oued-Zem, et ils accomplissaient
ensemble le pèlerinage à Miliana en Algérie, pour visiter le saint Abu al-Abbas Ahmad bin Yusuf al-Rashdi al-Miliani.

Marcel Lesne souligne que les deux groupes « n’étaient séparés que par deux journées de marche, et que les Bni Khirane venaient régulièrement chercher des épouses chez les Aït Bou –Hakki ». Néanmoins, en dépit de ces échanges, les deux tribus restent conscientes de leurs origines ethniques distinctes. Les seules fondations de leurs relations reposent sur les rencontres qui avaient lieu près du sanctuaire de leur saint vénéré à Miliana.

Aït Hkem-Tiddas : à la recherche du sens

Carte de Tiddas

« H’kam a bni Hkem » est une expression anecdotique utilisée entre les natifs du groupe à des fins amusantes, quand l’on veut céder la parole à son interlocuteur. Elle signifie littéralement  » à toi de commander, fils d’Aït Hkem », témoignant ainsi de leur fierté en tant que membres de cette communauté.
Pendant mon séjour sur le terrain, j’ai entendu à plusieurs reprises des personnes âgées affirmer que le nom « Aït Hkem » aurait été inspiré du rôle d’arbitrage qu’assuraient les Hakmaouites dans un passé lointain. Le mot « hkem » ou « hakem », emprunté de l’arabe « hakama », peut désigner à la fois le gouvernement, le contrôle, la gouvernance ou l’arbitrage. Cependant, il convient de noter qu’aucune source historique ne confirme cette hypothèse, et donc son origine reste incertaine.
D’après l’historien M. Achak, une légende peu connue dans la région propose une autre explication sur l’origine du nom « Aït Hkem ». L’histoire raconte qu’un Hakmaouite se serait rendu pour enterrer son père. Arrivé dans un endroit verdoyant, il aurait fait une halte pour savourer une plante sauvage (la myrrhe odorante),momentanément négligeant le corps de son père attaché au dos du cheval. Soudain, la dépouille aurait failli glisser, incitant l’homme à réagir de manière ironique en demandant au corps de son géniteur de rester immobile : ‘hkem ikhfennak’ (contrôle- toi).
Cependant, il est remarquable que les Hkmaouites, pour exprimer leur appartenance, préfèrent de moins en moins utiliser le nom de la confédération. Au lieu de se présenter comme natifs d’Aït Hkem, ils privilégient davantage l’identification au nom de leur village. Ainsi, ils disent plutôt « je suis de Tiddas », mettant l’accent sur leur attachement à ce bourg qui représente le cœur de leur groupement.

Le village qui était nommé « Tedders » par l’administration française pendant l’époque coloniale, a été rebaptisé « Tiddas » après l’indépendance. Bien que son origine demeure inconnue, une indication propose une interprétation intéressante.
Selon l’historien El-Houssein Jouhadi, le nom « Tiddas » pourrait être lié à un ancien jeu d’échecs ou de dames qui était pratiqué sur le champ de bataille. Autrefois extrêmement populaire dans la région, ce jeu aurait connu une évolution vers une version à deux joueurs, impliquant le déplacement de pions sur un damier en bois. Il convient de souligner à ce niveau que les Kabyles, de leur côté, emploient le terme
« tiddas » pour désigner le jeu de dames.
Par ailleurs, M. Achak avance une autre hypothèse quant à l’origine de Tiddas, qui pourrait également découler du terme berbère « tiddist » signifiant « la ruse ». En revanche, selonl’historien Si Ahmed Boubia, une autre interprétation émerge : le mot « Tiddas » pourrait dériver du terme berbère « tillass », signifiant les ténèbres. Les environs de Tiddas étaient renommés pour leur obscurité profonde et abritaient autrefois un groupe de bandits qui se cachaient dans ses forêts montagneuses, rendant les déplacements nocturnes périlleux. Ainsi, Tiddas pourrait avoir été nommée « tillass », suggérant une région très sombre à éviter la nuit.
Toutefois, la supposition la plus probable est celle qui relie le terme « Tiddas » à « tiddar » (sing. taddart) signifiant un ensemble de maisonnettes. Certains habitants de la région avancent que le village a vu le jour avec la sédentarisation du groupe, bien avant l’instauration du protectorat français.

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Les Hkmaouites, le makhzen et le siba

Fatiha AAROUR sur le terrain

Approcher l’histoire d’Aït Hkem sans évoquer le groupe principal auquel il appartient, Zemmour, est une tâche complexe. En effet, la plupart des références historiques le considèrent comme un sous groupement de Zemmour, Bien que les Hkmaouite continuent de revendiquer leur singularité et leur indépendance en tant qu’entité distincte. D’autre part, il est important de souligner que ces deux groupes ont souvent maintenu une alliance solide vis-à-vis du gouvernement du sultan, le makhzen, et que leurs désaccords étaient vraisemblablement rarissimes.
Le groupement Zemmour, incluant toutes ses composantes, est apparu dans l’histoire sous le règne du sultan Moulay Ismail (1645-1727). Son lien avec la dynastie alaouite était marqué par des oscillations : certaines tribus étaient plus au moins fidèles à la dynastie, d’autres se sont révoltées, certaines étaient périodiquement soumises, tandis que d’autres étaient en dissidence permanente.
Le terme « siba », qui signifie littéralement l’anarchie, était attribué par le makhzen aux régions dissidentes. Historiquement, il représente une forme de contestation politique et sociale à l’administration du sultan, couvrant la période allant de 1894 à 1912. Selon l’historien Abdelahad Sebti (Magazine Zamane, mai 2018), depuis la fin du 19 e siècle, la littérature ethnographique française a opposé deux termes : « Bled el makhzen » et « Bled siba ». Ces expressions désignent deux territoires distincts : d’une part, des villes et des plaines majoritairement arabophones soumises au makhzen (gouvernement du sultan), et d’autre part, des régions montagneuses majoritairement berbérophones en continuelle dissidence, refusant de se soumettre à l’impôt et ne reconnaissant pas l’autorité du sultan. Ces zones de dissidence comprennent notamment le Moyen Atlas, le Haut Atlas et le Rif. De cette manière, le terme « siba » évoque le désordre, la perturbation et la non- conformité aux lois de l’administration centrale.

Charles de Foucauld décrit la situation lors du siba en déclarant : « Il faut de plus, chose aussi nécessaire pour le Cherif que moi, chercher des zetats qui nous protègent sur les territoires des Gerouan et Zemmour Chellaha, où nous aurons à marcher dès le premier jour : ces tribus sont toutes des insoumises. Le Blad es-siba, pays libre, commence aux portes de Meknâs, et le chemin y demeure jusqu’à Tâdla, le Tâdla en fait lui-même partie. Nous quittons donc pour longtemps les Etats du sultan, le bled el makhzen, triste région où le Gouvernement fait payer cher le peuple une sécurité qu’il ne lui donne pas ; où ; entre les voleurs et le qaïd, riches et pauvres n’ont point de répit ; où l’autorité ne protège personne, menace les biens de tous ; où l’Etat encaisse toujours sans jamais faire une dépense pour le bien du
pays ; où la justice se vend ; où l’injustice s’achète, où le travail ne profite pas ; ajouter à cela l’usure et la prison pour dettes : tel est le blad el makhzen.»
Au début du 20e siècle, la situation décrite par l’officier de renseignement français Henry Godbarge (dans une note datée du 18 avril 1947 intitulée « Le conflit entre l’Orf et le Chraâ en pays des Zemmour »), se présentait de la manière suivante : dans les grandes villes et leurs environs immédiats, une autorité fragile émanant d’un pouvoir central se limitait essentiellement à une collecte laborieuse des impôts. Le reste du « Maghreb el Aqça » était considéré comme le « bled siba » ou le pays de la dissidence, principalement constitué des grandes tribus rurales, incluant les blocs berbères du Souss au sud, du Rif au nord, et du centre, parmi lesquels figuraient les Zemmour.
Marcel Lesne, quant à lui, explique la situation politique de cette époque complexe en ces termes : « Au début du 20e siècle, un groupe puissant de tribus berbérophones illustre, par des actes d’hostilité ou de brigandage, sa présence turbulente aux portes de Rabat et de Meknès. D’humeur guerrière, tout imprégnés des souvenirs de la rude vie en montagne menée par leurs pères, encore exaltés par une récente victoire sur la puissante tribu des Bni-Ahsene qu’ils repoussent, pas à pas, depuis des générations, les Zemmour font du bled siba une réalité vivante jusque sous les murs de Salé. »

Marcel Lesne affirme également qu’aucun étranger ne pouvait traverser ces territoires sans payer le tribut du passage : « Les tribus Zemmour ont apporté dans les plaines arabisées, l’ardeur guerrière et la rudesse des mœurs de la montagne berbère, jusqu’à l’intervention française et le rétablissement de l’autorité centrale. »

Les Aït Hkem et les Zemmour entretenaient avec le pouvoir central une relation ambivalente, caractérisée par un pragmatisme manifeste en fonction des rapports de force et du contexte politique. À certains périodes, ils se sont rapprochés de la dynastie alaouite, sous la direction des caïds choisis parmi eux, mais leur allégeance se limitait exclusivement au paiement des impôts. En effet, ces deux groupes ont toujours su préserver leur indépendance, notamment en ce qui concerne la gestion de leur vie quotidienne, en appliquant leurs propres règles coutumières.
Jusqu’à la fin du 17 e siècle, les Aït Hkem et les Zemmour ne se soumettaient pas au pouvoir central. D’après l’historien Mohammed Akensus (Al-Jaych Al-ârmaram Al- Khoumassi), lorsque le sultan alaouite Moulay Ismaïl (1645-1727) prépara une harka (expédition) en direction de Fezaz (Moyen Atlas), les Aït Hkem et les Zemmour exprimèrent leur volonté d’apaisement en lui témoignant leur allégeance. Le sultan
nomma alors Ben Ichchi Kebli, un Zemmouri de la tribu Ikbline, en tant que caïd des deux groupes, Aït Hkem et Zemmour. Ben Ichchi Kebli se révéla être un véritable collaborateur de l’administration du sultan. Après sa mort en 1691, il fut remplacé par son fils, Abou El-Hassan Ali Ben Ichchi, qui maintint la même politique que son père.
Plus tard, Ben Ichchi, le Pacha Msahl et Ouberka El Yamouri lancèrent des attaques contre les Aït Oumalou et les Guerouane, avec la participation des Zemmour et des Aït Hkem.
Après le décès du sultan Moulay Ismail, son fils Ahmed Dahbi lui succéda sur le trône. En entamant son règne, il fit exécuter le caïd Ali Ben Ichchi. Par la suite, en raison des luttes acharnées entre les fils de Moulay Ismaïl pour le pouvoir, le makhzen perdit progressivement le contrôle sur les tribus. Cependant, les Aït Hkem et les Zemmour restèrent à l’écart des disputes des princes et n’y participèrent pas.
Lorsque le sultan Mohammed Ben Abdellah monta sur le trône (1715-1790), les Aït Hkem et les Zemmour manifestèrent leur opposition en ne souhaitant pas soutenir son règne. En 1784, le nouveau sultan organisa une harka (mouvance) contre les Aït Hkem et les Zemmour. Ces derniers se réfugièrent à Tafoudeït, mais lorsqu’ils revinrent, ils furent attaqués par les Aït Idrassen et les Guerouan. Ultérieurement, Mohammed Ben Abdellah nomma un certain Belkassem Zemmouri en tant que caïd d’Aït Hkem et Zemmour. Sous son commandement, une attaque fut lancée contre les Aït Oumalou avec la participation des Aït Hkem, mais l’invasion échoua, entraînant ainsi l’instauration de la dissidence.
Le sultan ne tarda pas à nommer Ould-Mohammed Ouâziz Mtiri comme nouveau caïd des Aït Hkem et Zemmour. Cette nomination aurait pu être mal acceptée, étant donné que les Zemmour et les Hkmaouites avaient souvent du mal à se soumettre aux ordres des caïds qui n’étaient pas issus de leur propre groupe.
Marcel Lesne rapporte que les Zemmour se sont révoltés une fois de plus contre Moulay-Slimane, après un événement marquant. En 1818, ils participèrent à une expédition menée par le sultan contre les Aït Oumalou. Pendant les affrontements, seuls les Arabes furent touchés par la mort, tandis que les Berbères furent épargnés. Une entente entre les Berbères des deux factions ennemies fut établie grâce à l’intervention de Mohammed-El-Ghazi, le caïd des Zemmour.
D’après Lesne, El-Ghazi avait remarqué que le sultan, lors des engagements précédents, n’avait mobilisé que les Berbères, et il le soupçonna de vouloir les pousser à se battre les uns contre les autres. C’est ainsi qu’il se rapprocha des Zaïane en leur affirmant : « II n’y a pas de différence entre vous et nous. S’il y a
rencontre, nous tirerons à blanc les uns sur les autres. »
En 1820, les Aït Hkem et les Zemmour se sont portés au secours des habitants de Fès, indignés par les pillages des Guich Oudaïas, une composante de l’armée créée par le sultan Moulay Ismail. Les Fassis, mécontents des abus perpétrés par les Guich et désirant une abdication du sultan, ont sollicité le soutien des caïds berbères. Mohammed Ben-El-Ghazi s’est mobilisé à Fès avec des cavaliers des Zemmour et des Aït Hkem. El-Hassan-Ben Hammou Ouâziz Mtiri, dirigeant des Aït- Idrassene, s’est également rallié à eux pour renverser le sultan en place, le remplaçant par Moulay-Brahim-Ben-Yazid.

Après le décès du caïd Ben El-Ghazi, le sultan Moulay Abderrahmane (1778-1859) a mis en place une politique encourageant la diversité des caïds, rompant ainsi avec la tradition qui imposait que ces derniers soient choisis parmi les populations concernées. Un certain Toumi, issu des Aït Siberne, fut nommé caïd de la confédération d’Aït Hkem. Cependant, la révolte persista et Toumi finit par fuir vers la tribu arabe des Beni Hsein. Le sultan réagit en nommant successivement un certain Blâbbas, puis un certain Mohammed Ben Mbarek comme caïds des Aït Hkem.
Néanmoins, malgré ces changements, la révolte et le siba continuèrent. En revanche, les Zemmour et les Aït Hkem ne sont pas apparus hostiles envers le sultan Mohammed-Ben-Âbderrahmane (1810-1873). Les conflits passés semblaient les avoir épuisés, et avec l’arrivée du nouveau sultan, ils ont saisi l’opportunité de se rapprocher de lui et de mettre fin aux expéditions punitives. Cependant, cela ne signifiait pas une soumission totale. Marcel Lesne affirme à ce propos que « les Zemmour ne deviennent pas pour autant des tribus véritablement soumises ; tout en les considérant comme tribus makhzen, le sultan transige avec eux et leur laisse comme prérogative la liberté de vivre selon leur loi coutumière. Les Zemmour conservent donc leur particularisme et ni les « caïds » ni le « chraâ » ne viennent influencer l’orf berbère. »
Lorsque le sultan Moulay-Hassan (1836-1894) monta sur le trône, bien qu’il ait été accueilli favorablement par la majorité des Zemmour, les Aït Hakem firent le choix de se distinguer de leurs frères en refusant de reconnaître son règne. En réponse, le nouveau sultan organisa une harka pour les punir, cette fois-ci avec le soutien des Zemmour, leurs alliés historiques, qui l’aidèrent à mettre fin à leur révolte.
Quelques années plus tard, les troubles ont refait surface avec l’avènement du sultan Moulay Abdelaziz (1894-1908) et se sont poursuivis tout au long de son règne. La situation n’a pas connu de changement significatif sous le règne de Moulay Hafid.

Les Aït Hkem et les Zemmour étaient en état de siba et en profitaient pour maintenir leur contrôle sur la forêt de Mâmora jusqu’au port de l’Atlantique.

Sous le protectorat français

À la suite au traité de Fès conclu le 30 mars 1912, le Maroc est passé sous le protectorat français. Dans le cadre de cet accord, le sultan s’est engagé à ne former aucune alliance avec un autre pays que la France et à ne solliciter aucun emprunt auprès d’une autre puissance. En retour, le gouvernement français a affirmé son respect envers le sultan et la religion musulmane.
Plus tard le Général Lyautey a été nommé commissaire général de la République, exerçant les pouvoirs du gouvernement français au Maroc. Quelques mois plus tard, la résidence générale a contraint le sultan Moulay Hafid à abdiquer le 13 août 1912, le remplaçant par son frère Moulay Youssef, qui deviendrait le père du futur sultan Mohammed V.
L’établissement du protectorat a entraîné un soulèvement général, y compris chez les Zemmour et les Aït Hkem. Les forces françaises se sont mobilisées vers cette région afin de mettre en place un poste de contrôle. Une bataille contre les résistants Hakmaouites a eu lieu dans la matinée du 9 mars 1912. Le 10 mars, le Colonel Brulard a mené une autre opération à Djbel Hdid. En rentrant à Tiddas le 11 mars,
les troupes françaises ont réussi à maintenir certains groupes hostiles à distance, puis elles ont rejoint Maaziz le 12 mars 1912.
Dans sa publication Sur les traces glorieuses des pacificateurs du Maroc (1939), le Colonel L. Voinot rapporte qu’en date du 2 mai 1912, le Commandant Rouquette, responsable du poste de Mâaziz, a tenté d’engager une confrontation avec des résistants, mais il s’est retrouvé pris pour cible près de Touijine lors d’une opération menée par des Hkmaouites, des Zemmour et des Zaïane : « Au retour vers le camp
l’arrière-garde doit soutenir, sur deux kilomètres, un violent combat en terrain très difficile. Les « joyeux » luttent à l’arme blanche ; ils ne réussissent à se dégager qu’au prix de grosses pertes. Le bilan de l’affaire est de dix-sept tués et vingt-sept blessés, dont le Lieutenant Mas-Carat, du bataillon d’Afrique. »
Le Colonel L. Voinot précise que la prise du pays des Zemmour et des Aït Hkem a exigé plusieurs actions : « Pour calmer les Zemmour, il faut l’action combinée des Colonels Blondlat et Gueydon de Divers. Après avoir liquidé les Zaër, leurs deux colonnes opèrent entre Maaziz et Tedders ; quelques coups de canon sont tirés sur les rebelles, le 30 novembre 1912, près de Zebboudja-Cheurfa. On rejette les groupes hostiles dans la montagne. Les troupes de Gueydon de Dives sont ensuite ramenées en Chouïa. Tedders sert de couverture à la limite de la zone insoumise ; les sorties de la garnison inquiètent l’ennemi. L’une d’elles lui infligé des pertes sérieuses au voisinage du poste, le 6 décembre ; nous avons un tué et huit blessés.

Le 16 décembre Blondlat écrase trois cents dissidents à Bab-Mahcer, à une, vingtaine de kilomètres à l’est de Maaziz. A partir de ce moment, il n’ya plus que des opérations de détail ; on réalise peu à peu la pacification. »
Le Général Blondlat a finalement réussi à établir un poste à Tiddas, sur les terres agricoles des Aït Hakem. Cependant, le contrôle de la région n’est devenu effectif qu’au printemps de 1913. Du 25 avril au 10 mai 1913, le Lieutenant-Colonel Coudein a parcouru toute la région montagneuse des Zemmour, de l’Oued Beht au Bou Regreg. Les Ighwaghen (résistants) des Zemmour, des Aït Hakem et des Zaïane ont été battus sur le plateau d’Oulmès, ce qui a conduit les tribus Hkmaouites à fuir vers les montagnes d’Oulmès et d’Aguelmous.
Le nouveau régime politique établi sous le protectorat s’est fondée sur une profonde réforme des institutions administratives. Cependant, il est important de noter que ce processus n’a pas supprimé les instances makhzeniennes existantes, car l’objectif était de ne pas donner l’impression de contrôle.
Selon Charlotte Jelidi, auteure de « Fès, la fabrication d’une ville nouvelle (1912- 1956) », l’administration du protectorat français a mis en place de nouveaux bureaux de gestion, réorganisé les anciens et assuré la coordination ainsi que la surveillance de leurs activités. De ce fait, officiellement, l’administration était considérée comme mixte, avec les autorités makhzeniennes censées gérer le territoire sous le contrôle
des autorités françaises. Néanmoins, le pouvoir était centralisé au sein de la Résidence Générale, qui détenait effectivement les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, tout en exerçant un contrôle sur l’ensemble des institutions locales et régionales.
Il est important de noter que la promulgation du Dahir Berbère le 16 mai 1930 a déclenché une révolte au sein du mouvement national en plein essor. L’objectif de ce texte était de réguler le système judiciaire au sein des tribus berbères qui ne suivaient pas la loi coranique (chraâ). Ce soulèvement contre le Dahir Berbère a renforcé les idéaux et les actions du mouvement national, réussissant à obtenir le soutien de la quasi-totalité des mécontents, y compris les leaders de la résistance berbère. Par conséquent, les distinctions identitaires ont perdu de leur importance, laissant la religion musulmane devenir le facteur d’unification, indépendamment de l’origine ethnique.
D’après l’historien Mouloud Achak, la résistance hekmaouite s’est exprimée à travers les actions des Ighwaghen qui entretenaient des liens étroits avec le mouvement national. Cette organisation locale a réussi à perdurer jusqu’à la proclamation de l’indépendance du pays. Les résistants étaient principalement basés dans les montagnes de Tighza et Tizra.
En 1953, l’Organisation de l’Armée de l’Atlas (OAA) a été créé, comptant 24 Aghwagh (résistant) parmi ses membres. Les fondateurs de cette organisation étaient Lehssan Benâmran, Ahmed Benâtchan et Moulay Lekbir Haddaoui, qui collaboraient étroitement avec des nationalistes basés à Casablanca.

Par ailleurs, une autre cellule de résistance a été formée à Tighza sous la direction de Moulay Lekbir Haddaoui, avec un noyau dur composé d’Ahmed Zoubir, Messaoud Bendriss et Rahhou Daresse. Trois tribus principales, Aït Alla, Aït Bou-Hakki et Aït Boumeksa, soutenaient la lutte de ce groupe de résistants.
A cette époque, d’après le récit de mon père, deux étudiants originaires d’Aït Boumeksa, qui poursuivaient leurs études à l’université d’Al Quaraouiyine à Fès et qui avaient rejoint le mouvement national, jouaient un rôle crucial dans la lutte locale en assurant la coordination entre les résistants d’Aït Boumeksa et la section de Fès : J’ai eu l’opportunité d’assister à plusieurs réunions qui se tenaient dans la plus grande discrétion, dans une petite demeure en paille située à Aït Elânzi. Les deux militants qui organisaient ces rencontres étaient Si Bouh, originaire d’Aït Mahfoud, et Si Montasser, issu d’Aït Elânzi. Si Montasser est devenu juge après l’indépendance, cela témoigne de l’engagement et de l’influence de ces étudiants à l’époque.
Le 2 mars 1956 a marqué un moment décisif dans l’Histoire du pays avec la proclamation de la fin du protectorat français : Mohammed V a annoncé solennellement l’indépendance du Maroc devant le peuple. Dans le pays d’Aït Hkem, la joie était palpable, la population nourrissait depuis longtemps le rêve de recouvrer sa liberté et son indépendance. Cependant, le nouveau pouvoir s’est retrouvé confronté à des contraintes majeures. L’une des principales difficultés était le manque d’une élite instruite et qualifiée pour occuper des postes clés dans les institutions gouvernementales. Afin de relever ce défi, les autorités ont procédé au recrutement actif des jeunes marocains dans divers établissements tels que l’armée,
l’administration, la justice et l’enseignement. Cette initiative a également inclus les rares Hkmaouites qui avaient suivi des cursus scolaires et universitaires.
L’indépendance du Maroc a inauguré le début d’une nouvelle ère mais elle a aussi engendré d’importants enjeux. La construction d’un État central fort est devenue impérative pour le nouveau pouvoir, dans le but d’éviter le retour aux rébellions permanentes qui avaient caractérisé le pays jusqu’en 1912.

Aït Hkem après l’indépendance

Le territoire d’Aït Hkem, autrefois réputé pour sa résistance et son autonomie vis-à- vis du pouvoir central, tout comme d’autres régions du pays faisant partie de la zone de siba, a été profondément transformé après l’indépendance. Ses structures et son mode de vie ont progressivement cédé la place face à une politique systématique de contrôle et de domestication.
Il est essentiel de mettre en lumière le rôle crucial du roi Hassan II dans l’orientation politique instaurée après l’indépendance. Le souverain a su faire prévaloir sa conception de l’identité marocaine en la condensant en cinq piliers auxquels tous les Marocains étaient appelés à adhérer : l’islam, la monarchie, l’unité nationale, la doctrine malékite et la langue arabe.

Dans cette perspective, la politique d’arabisation s’est accélérée, entraînant une prédominance progressive de l’arabe classique et dialectal sur le berbère dans de nombreuses régions du pays. Ces transformations ont été des facteurs décisifs dans la formation de l’identité nationale et l’unification du pays autour d’un socle commun.
Cependant, ces évolutions ont également suscité plus tard des débats et des tensions concernant la concentration du pouvoir et la préservation de la richesse culturelle et linguistique du pays.
Par ailleurs, le parti nationaliste Istiqlal a joué un rôle déterminant dans le processus d’arabisation du Maroc. Après quarante-quatre ans de protectorat (1912-1956), le Maroc indépendant a été le théâtre d’une lutte acharnée menée par l’opposition, dirigée par ce parti. L’arène politique a été le lieu de rivalité entre deux acteurs majeurs : le roi d’un côté, et d’un autre, le parti nationaliste Istiqlal. Cet organisme
politique, qui se référait au panarabisme, cherchait à prendre les rênes des affaires publiques et à imposer sa conception de la « nation marocaine ». En fin de compte, l’idéologie nationaliste a fini par prévaloir et à impacter tous les aspects de la vie de la majorité des Marocains, que ce soit en milieu urbain ou rural.
Par conséquent, les réformes administratives et juridiques subséquentes ont marqué le déclin de l’organisation tribale et de son système. Particulièrement, avec la mise en vigueur du dahir n° 1-59-315 en juin 1960, les communes élues, opérant sous la supervision du ministère de l’Intérieur, ont pris en charge les fonctions et les pouvoirs majeurs qui étaient auparavant du ressort de l’assemblée tribale. Dès lors, les
autorités ont commencé à exercer un contrôle exclusif à plusieurs niveaux.
En somme, ce contexte historique et géographique constitue un arrière-plan essentiel pour appréhender et analyser de manière appropriée les évolutions qu’a connues la confédération d’Aït Hkem, que ce soit sur les plans politique, économique ou social. Nous avons affaire à un processus de contrôle et de domestication qui s’est déroulé sur une période étendue, où les éléments externes ont joué un rôle
essentiel dans le déroulement des événements.

A lire aussi: Renoncer pour mieux comprendre
Les prochains chapitres adopteront une approche chronologique comparative afin de mieux comprendre les fondements de la transformation de la société hekmaouite.
L’objectif principal est de mettre en lumière les divers aspects spécifiques de ce groupe, qui ont été influencés par une multitude de facteurs, englobant le contexte social, administratif, politique, juridique et économique à travers les différentes périodes.


A suivre…

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