Le combat des femmes Soulaliyates pour l’accès égalitaire aux terres collectives est une des luttes féministes majeures de ces dernières décennies. Seize ans après, ces femmes et l’Association de la défense des droits des femmes (ADFM) font le point sur ce combat. 

En 2007, un groupe de femmes membres de la tribu de ElHeddada dans la région du Gharbcrient leur colère face à l’injustice subie dans la répartition des terres collectives. A cette période, le boom immobilier est à son zénith. Les grands groupes immobiliers lorgnent ces terres devenues lucratives. C’est à son moment que ce groupe attache avec l’ADFM à Rabat pour trouver soutien et conseil dans un dossier complexe aux ramifications juridiques, administratives et économiques. De ce long combat aboutira la loi n°62.17 relativeà la tutelle administrative sur les communautés soulaliyates et la gestion de leurs biens. Une première victoire mais aussi de nombreux défis qui demeurent poser dans ce dossier. Les principaux protagonistes de cette lutte ont organisé une rencontre à Rabat le 6 décembre dernier pour poser ces enjeux et jeter un coup d’œil sur le rétroviseur d’une lutte inlassable en faveur des droits de ces femmes au Maroc.

Une loi, mais…

« Le problème réside dans l’application de ces lois, qui demeure difficile en raison
des problèmes rencontrés par les femmes avec leurs frère ».

« Nous avons lutté pour obtenir les mêmes droits à la terre que les hommes. Après 16 ans de combat et de collaboration avec l’ADFM, nous avons réussi à obtenir des lois qui garantissent en quelque sorte nos droits », explique RkiaBelout, femme soulalya de la tribu Heddada(région du Gharb).

Et d’ajouter: « Le problème réside dans l’application de ces lois, qui demeure difficile en raison des problèmes rencontrés par les femmes avec leurs frères, au sein de la tribu et également avec les autorités. La question des terres demeure un sujet très délicat ».

Soulalyates : Trois chapitres d’une lutte

L’histoire des soulalyates a pris a démarré au moment où la SoulaliyaRkia Bellout adresse une requête à l’ADFM en 2007, exposant l’injustice envers les femmes soulaliyates. À partir de là, débute la quête de leurs droits. Pour l’anniversaire des seize ans de cette action, l’ADFM et les femmes soulaliyatesrevisitent les moments clés de cette bataille. 

« Le combat ardant des soulaliyatess’est articulé en trois phases », rappelle Amina Lotfi, présidente du bureau de Rabat de l’Association démocratique des femmes du Maroc,

La première phase a nécessité « une analyse approfondie du dossier, englobant ses aspects juridiques, économiques, sociaux et familiaux afin de comprendre sa complexité », poursuit la militante féministe.  La deuxième phase a été consacrée « au renforcement des compétences des femmes soulaliyates en communication, droits de l’homme et prise de parole en public, aboutissant à des résultats concrets avec des prises de position fermes et des interventions convaincantes de ces femmes », détaille Lotfi. 

« Ces deux phases ont contribué à forger un mouvement solide parmi les femmes soulaliyates, partageant une vision commune et des revendications claires, selon la présidente de l’ADFM. La troisième phase a impliqué un plaidoyer à l’échelle locale et nationale, comprenant des sit-in et diverses manifestations devant des institutions clés telles que le ministère de l’Intérieur, le Parlement et les préfectures. Les actions médiatiques ont amplifié la voix des femmes soulaliyates, et ces réalisations ont été fièrement mises en avant lors de cette rencontre », affirme Amina Lotfi.

Et d’ajouter:« Cette réunion constitue un bilan, revisitant les 16 années de lutte et de collaboration avec les femmes soulaliyates en vue d’atteindre l’égalité dans le droit à la terre ».

L’événement a également inclus une rétrospective présentée par Khadija Ouald Mou, une figure de prouede l’association, retraçant le parcours depuis 2007 pour renforcer les compétences des femmes soulaliyates. De plus, la féministe Rabéa Naciri, a exposé l’évolution du dossier sur le plan juridique et l’impact des coutumes. 

Le moment le plus poignant de cette rencontre a été celui permettant aux femmes soulaliyates de partager leurs expériences depuis 2007, à travers des scènes théâtrales retraçant des histoires véridiques et vécues.

Cette rencontre a permis de faire le bilan des réalisations du mouvement des femmes soulaliyates, avec l’ADFM en soutien, dont l’accomplissement majeur demeure la loi n°62.1.

Malgré cette avancée législative, les femmes soulaliyates ont souligné lors de cette rencontre que la mise en œuvre de cette loi est entravée par de nombreuses difficultés persistantes.