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Procédure d’Asile au Maroc : Enjeux et réalités

Dans les méandres de la quête de refuge au Maroc, s’écrit une histoire complexe et souvent méconnue. Pour de nombreuses personnes, le droit d’asile apparaît comme un éclat d’espoir fugace dans un pays où les défis demeurent nombreux, où les chemins vers la sécurité sont pavés d’obstacles. Enquête. Partie 3.

Par Imane Bellamine ( Texte ) et Anass Laghnadi (vidéo)

La procédure d’asile au Maroc se décompose en trois phases distinctes. Tout d’abord, il y a la présentation et l’enregistrement de la demande, qui nécessite de se rendre au bureau du HCR à Rabat . Le demandeur d’asile doit remplir un formulaire d’enregistrement avec des informations générales sur lui-même, ainsi que les raisons de sa demande et les motifs de son départ de son pays d’origine. Un entretien est ensuite organisé, basé sur les informations fournies dans le formulaire. Le HCR évalue ensuite la demande sur une période pouvant aller jusqu’à quatre mois, sauf si celle-ci est jugée manifestement infondée ou abusive. Seules les demandes qui ne correspondent pas à la définition de réfugié sont susceptibles d’être rejetées par le HCR. 

Ensuite, vient l’étape cruciale de l’entretien de détermination du statut de réfugié (DSR), au cours de laquelle le demandeur doit fournir des détails précis sur les faits, lieux, dates et raisons de ses craintes de persécution ainsi que les éléments déclencheurs de son départ. Ces informations restent confidentielles et un interprète est mis à disposition du demandeur gratuitement en cas de besoin. L’entretien aborde divers aspects tels que l’engagement politique du demandeur, les faits, les menaces et les risques de persécution et de discrimination, ainsi que l’itinéraire suivi jusqu’au Maroc. Le manque de crédibilité peut souvent conduire le HCR à rejeter une demande.

Si le statut de réfugié n’est pas accordé, le demandeur a la possibilité de faire un recours dans un délai de 30 jours à compter de la date de notification du rejet.

Enfin, la décision de reconnaître ou non le statut de réfugié est rendue au demandeur. En cas de réponse positive, une carte de réfugié valable un an et renouvelable est délivrée. En revanche, en cas de refus, une notification écrite est remise au demandeur, motivée en fonction des éléments fournis lors de l’entretien. Si le statut de réfugié n’est pas accordé, le demandeur a la possibilité de faire un recours dans un délai de 30 jours à compter de la date de notification du rejet. Si ce recours aboutit, le statut est accordé et un certificat de réfugié est délivré. Tout au long de la procédure, le demandeur d’asile est sous la protection du HCR jusqu’à ce qu’une décision finale soit prise.

La délivrance de l’acquis de droit par le HCR ne constitue pas la dernière étape, car c’est le BRA qui attribue la carte de réfugié. Ainsi, le demandeur d’asile doit passer un autre entretien devant un comité du bureau de réfugiés et apatrides pour obtenir la reconnaissance du statut de réfugié. 

«Le demandeur peut former son recours par lui-même ou à l’aide de la clinique juridique Hijra qui joue le rôle de représentant légal dans trois villes (Tanger, Rabat et Agadir) ».

Clinique Juridique Hijra Rabat.

« Au cas où le demandeur d’asile n’est pas reconnu par le HCR, celui-ci reçoit une lettre de notification qui reprend brièvement les éléments de la décision de rejet. Suite à cette notification, le demandeur d’asile a quatre semaines pour soumettre un recours auprès du même bureau du HCR. Le demandeur peut former son recours par lui-même ou à l’aide de la clinique juridique Hijra qui joue le rôle de représentant légal dans trois villes (Tanger, Rabat et Agadir) », explique Younous Arbaoui de la clinique juridique Hijra dans un entretien précédent.

«À la suite du recours, la réponse du HCR est définitive. En cas de rejet de recours, la décision du HCR ne peut pas être contestée devant un juge, vu que sa décision n’est pas administrative. Le dossier devient donc fermé», ajoute-il.

Dans ce même contexte, un rapport de la Clinique Juridique Hijra souligne les lacunes de la procédure d’asile au Maroc ainsi que les défis auxquels est confrontés le HCR.

«La lenteur dans le traitement des demandes d’asile est un des obstacles majeurs. Les demandeurs d’asile vivent dans l’incertitude et peuvent attendre jusqu’à un an pour un entretien».

Ensuite, la clinique met l’accent sur le fait que certains demandeurs d’asile ne soient pas informés de la suite de la procédure et ignorent leur droit de renouveler leur certificat d’asile pendant le processus de recours. Le non-renouvellement expose à un risque d’arrestation par la police et de détention. Cela conduit souvent à des dossiers clos, des demandes de renouvellement tardives et à une multiplication des demandes de réouverture, surchargeant le HCR. Cela place les demandeurs d’asile dans une situation de vulnérabilité, en contradiction avec la mission principale du HCR qui est de garantir les droits et le bien-être des réfugiés.

À suivre…

NB : Les noms ont été changés pour préserver l’anonymat des personnes interrogées.

** Ce contenu a été réalisé grâce à une bourse journalistique octroyée par le Réseau Marocain des Journalistes des Migrations en partenariat avec Oxfam Maroc dans le cadre du projet « Protection, Résilience, Migrations », avec le soutien financier de l’Union Européenne. Son contenu relève de la seule responsabilité de l’auteur/trice et ne reflète pas nécessairement l’opinion des partenaires programmatiques et financiers.

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