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Serge Guemou : « Le Maroc, mon Eldorado »

Serge Aimé Guemou est un ressortissant camerounais résident au Maroc depuis 2006. Cet immigrant se présente comme le modèle de l’intégration au sein de la société marocaine. Récit d’aventurier devenu sage. 

Serge est un homme qui aime bien à la fois les métaphores et les formules diplomatiques. Quand on lui pose une question, ce Camerounais de 47ans a le sens de la formule pour esquiver nos questions, avec courtoisie. Le président actuel du Conseil des Migrants Subsahariens au Maroc (CMSM) sait être discret. Son sujet de prédilection est le « bilan très positif » de la Stratégie nationale d’immigration et d’asile (SNIA). En tant qu’acteur impliqué dans la mobilisation des communautés subsahariennes, il ne tarit pas d’éloges sur le gouvernement marocain depuis 2013. Pour parler de son parcours et de son récit de vie, le journaliste Fillippo Rossi, vient de lui consacrer un livre sous le titre révélateur : « Impossible n’est pas camerounais ». 

Acteur de la SNIA

« Je suis arrivé à Oujda en 2006 via la route. J’étais venu à la recherche du bien-être. Avec les années, j’ai  trouvé mon Eldorado au Maroc. Ce pays est mon Eldorado », se confie-t-il. Il passe quelques mois, puis part vers la capitale Rabat. « Rabat est devenue ma ville d’accueil. Sur place, j’ai commencé à militer au sein du CMSM et c’est ainsi que l’aventure a commencé », raconte-t-il. En 2012, son épouse le rejoint au Maroc depuis le Cameroun. « J’ai commencé à me stabiliser. Il fallait que ma famille vive avec moi », souligne-t-il. En 2013, il devient vice-président du CMSM, principale organisation représentant les migrants à cette période. 

« J’ai eu vent du début de la SNIA, j’étais mobilisé avec d’autres leaders communautaires pour préparer le terrain. Nous avons sensibilisé la communauté, ainsi que  toutes les communautés pouvant  participer à la campagne de régularisation. Nous devions apporter la bonne nouvelle auprès des nôtres. Cette campagne demeure un acte très important. Et la SNIA a un bilan très positif », estime-t-il.  Depuis, Serge est devenu président du CMSM. Cette organisation connait une baisse de régime, à l’instar des autres organisations communautaires de la diaspora subsaharienne au Maroc. 

Un aventurier devenu sage

Sur le plan professionnel et personnel, Serge entame une reconversion et se lance dans de nouvelles formations. « J’ai suivi une formation d’aide-soignant, puis une deuxième formation de deux ans en tant que technicien spécialisé en matière d’aide-sociale. Je me devais de perfectionner mes connaissances », reconnait-il. Et de poursuivre : « Ceci n’aurait pas été possible sans la chance donnée par le Maroc à des migrants comme moi pour bénéficier de formations qualifiantes et de retourner à l’école. Je suis le prototype de l’intégration réussie au Maroc ».

Depuis, Serge est passé d’un candidat à l’immigration vers l’Europe à un travailleur mobile entre les villes marocaines. Au gré des opportunités de l’emploi, il se déplace de Fès à Tétouan. « C’est au nord où je travaille pour porter assistance aux jeunes migrants dans cette région du Maroc », indique le natif de Douala. 

« Je suis passé du statut de migrant à acteur de la société. J’aime partager cette expérience avec les jeunes. Montrer comment se faire accepter par le pays hôte et par la population marocaine », poursuit-il. 

Le livre qui lui est dédié par Filippo Rossi raconte cette passion et ce parcours.

Le livre qui lui est dédié par le Filippo en journaliste Filippo Rossi raconte cette passion et ce parcours. « J’ai rencontré Filippo en  2015  dés lors que j’étais en vacances au Cameroun. Je lui ai fait confiance pour raconter ma vie et mon expérience que je pense extraordinaires.  On devient extraordinaire car nous sommes accompagnés par des personnes qui sont toutes aussi exceptionnelles », explique-t-il. 

« Ce que je suis aujourd’hui, c’est grâce à mon expérience marocaine ».

Serge estime qu’il est « sur le chemin de celui des doyens de la communauté camerounaise au Maroc. Je suis aujourd’hui un des ainés. Mon fils est né au Maroc. Son nom est Philipe. Il s’intègre à l’école à Tétouan », nous dit-il. Et de conclure : « Ce que je suis aujourd’hui, c’est grâce à mon expérience marocaine. Lorsque je suis arrivé j’étais loin d’être parfait. J’ai tant appris au Maroc. Aujourd’hui, je suis un être heureux, je me sens à l’aise dans mon pays de résidence ». 

Présentation du livre : « Impossible n’est pas camerounais » par Filippo Rossi, éditions Baudelaire, 2023. 

« L’histoire de Serge Guemou représente le périple et la lutte de millions de migrants dans le monde. Son histoire est commune à de nombreuses personnes qui ont tenté de sauver leur vie. Mais Serge, Camerounais d’origine et aujourd’hui résidant au Maroc, a quelque chose de différent : sa ténacité et son charisme, qui l’amènent à vivre des situations exceptionnelles. Son récit à 360 degrés ouvre les portes sur le monde mystérieux de la migration subsaharienne. Au cours de son épopée, il démontre que derrière les vols, les emprisonnements, les fuites et les arnaques se trouve sa survie, il y a une grande humanité. Le mot « impossible » joue un rôle central dans cet ouvrage, car même en risquant sa vie, changer son existence ne découle pas souvent d’une libre décision. Parfois, il s’agit d’une obligation et d’une tentative désespérée pour trouver une issue favorable. Pour les gens comme Serge, il n’y a pas de deuxième chance, pas de marche arrière. Car admettre que l’impossible a gagné, cela signifie la défaite d’une vie entière et la perte de l’honneur face à la famille à la société et envers soit même –ce serait à ce moment là le pire des crimes ». 

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