À Zagora, ce que j’ai vu
À Zagora, région du sud-est du Maroc, se déploie un récit de défis et de changements. Autrefois réputée pour ses oasis luxuriantes, cette terre est aujourd’hui confrontée à des bouleversements climatiques majeurs, remettant en question des modes de vie séculaires. Nous avons passé quelques jours. Bribes d’un voyage à Zagora:

À travers notre périple, nous nous sommes plongés dans l’univers de cette ville où les paysages arides cachent des histoires de courage et d’adaptation au milieu d’un tableau sombre, les manifestations de résilience étaient tout aussi palpables, se déclinant en trois thématiques distinctes.
Au milieu de ce sombre tableau, les manifestations de résilience étaient tout aussi palpables.
À M’hamid El Ghezlane, village déserté par ses habitants parce qu’ayant décidé l’exode, et contrastant avec le dynamisme observé au centre de Zagora, chaque rencontre révélait une forme de résilience. On percevait leur attachement viscéral à leur terre, à leurs oasis.
Lors de nos échanges avec des figures locales telles que Mohammed, un de nos guides, ses mots résonnaient avec force : « Si nous partons tous, qui restera ? C’est ici que sont mes racines, je ne saurais vivre ailleurs. Je m’adapte, je réinvente, avec foi en des jours meilleurs pour nos oasis, pour nos descendants à venir ». Cet esprit combatif et cette acceptation de la situation actuelle, tout en travaillant à son amélioration, se révélaient également lors de nos entretiens avec d’autres habitants.
À M’hamid El Ghezlane, village déserté par ses habitants ayant décidé l’exode.
Malgré la sécheresse persistante et la rareté des ressources, Mohammed choisissait de cultiver ses palmiers, satisfait de sa décision.Najib, quant à lui, jonglait entre son travail dans le tourisme et son engagement pour l’agriculture, bâtissant une petite ferme écologique reçue en héritage de ses ancêtres.
La troisième forme de résilience, celle-ci est d’une puissance remarquable, émane de la communauté des femmes oasiennes. Lors de notre visite à l’association de Latifa, une atmosphère où règne la frustration, et où l’invisibilité planait, témoigne des défis auxquels font face les femmes dans cette région marginalisée. Cependant, face à ces obstacles, une forte résilience émane de ces femmes. Latifa, Fadma, Ytto, Fatima, Aicha, ainsi que d’autres rencontrées et entendues, incarnent toutes le modèle de la femme marocaine oasisienne, robuste et résiliente. Malgré les conditions difficiles, la pauvreté et les responsabilités accablantes, elles cherchent sans relâche des moyens de subvenir à leurs besoins tout en préservant leur identité. Elles militent ardemment pour trouver des solutions afin de survivre et de soutenir leur famille, en mettant un accent particulier sur l’éducation de leurs enfants.
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Ensemble, ces femmes forment un réseau de sororité et de solidarité remarquable. Elles ont établi un espace de travail collectif, mais aussi un lieu d’évasion où elles partagent leurs peines, leurs joies et leurs expériences. C’est un environnement sain où elles s’encouragent mutuellement en travaillant à construire un avenir meilleur pour elles-mêmes et leurs enfants. Elles évoquent leurs oasis avec émotion, et malgré les larmes, elles restent optimistes.
Leur unique demande serait que leur voix soit entendue et que des projets soient mis en place en leur faveur pour s’adapter aux nouvelles réalités de vie. Ces femmes oasiennes, fières, fortes et travailleuses, ne reflètent pas seulement l’image de Zagora, mais aussi celle de toutes les femmes oubliées dans plusieurs régions du Maroc, où la sororité et la solidarité féminines incarnent un espoir tangible, même lorsque les politiques publiques restent décevantes.
Entre changements climatiques, migration interne et résilience, deux questions résonnent toujours après notre enquête: pourquoi cette population oasienne est-elle marginalisée ? Et pourquoi manque-t-il des projets adaptés pour la soutenir dans cette lutte quotidienne ?