Incendies à Bni Makada : Le désarroi !
Tanger, ville en pleine expansion, est de nouveau touchée par des incendies ravageurs qui frappent ses marchés de proximité. Samedi 22 février, plusieurs commerçants ont vu leurs moyens de subsistance partir en fumée, engendrant des pertes estimées à des centaines de millions de centimes.

Texte Salma El Harrak, Vidéo Mohamed Nassar (Tanger)
Face à l’urgence, habitants et commerçants ont tenté d’éteindre l’incendie avant l’arrivée des pompiers, que beaucoup jugent trop tardive. « Si les secours étaient intervenus à temps avec des camions-citernes et du matériel adapté, plusieurs magasins auraient pu être sauvés« , déplore un commerçant sinistré.
Tout ce que j’avais a disparu en quelques minutes. Mon stock représentait des mois d’investissement. Aujourd’hui, je dois tout recommencer à zéro, mais sans aide, c’est impossible
Parmi les plus touchés figurent des vendeurs qui avaient accumulé d’importants stocks en prévision du mois de Ramadan. « Tout ce que j’avais a disparu en quelques minutes. Mon stock représentait des mois d’investissement. Aujourd’hui, je dois tout recommencer à zéro, mais sans aide, c’est impossible« , confie Youssef, un marchand du marché Beni Makada. Comme lui, de nombreux commerçants se retrouvent sans ressources, souvent en raison de l’absence de mesures de prévention efficaces.
La frustration des commerçants se tourne également vers Amendis, la société chargée de la distribution d’eau et d’électricité à Tanger. Selon eux, l’incendie aurait pu être évité si leurs nombreuses alertes concernant l’état du réseau électrique avaient été prises en compte. Des manifestations ont éclaté dans la ville, scandant des slogans tels que Acha Chaab (Vive le peuple) en signe de protestation.
Il faut et quoi qu’il en coûte créer des couloirs de sécurité, et limiter l’accumulation d’objets inflammables dans les allées.
Fatima, vendeuse de produits artisanaux.
Les installations électriques, jugées obsolètes, sont pointées du doigt. « Les branchements sauvages sont nombreux et un simple court-circuit peut tout embraser », explique Hassan, vendeur de fruits et légumes. Il plaide pour une modernisation du réseau électrique et l’installation de dispositifs de sécurité tels que des coupe-circuits et des détecteurs de fumée.
L’aménagement des marchés de Tanger reste en outre un problème majeur. « Quand un incendie démarre, les pompiers ont du mal à accéder aux lieux à cause des ruelles encombrées. Il faut et quoi qu’il en coûte créer des couloirs de sécurité, et limiter l’accumulation d’objets inflammables dans les allées« , souligne Fatima, vendeuse de produits artisanaux.
Amine, épicier, estime que la prévention doit également être prise en main par les commerçants : « Beaucoup d’entre nous ne savent pas comment réagir face à un incendie. Si nous avions une formation sur l’utilisation des extincteurs et les risques électriques, cela pourrait faire la différence. »
Une assurance quasi inexistante
Nous ne sommes pas assurés car cela coûte trop cher. Si une formule collective était proposée par la mairie ou la chambre de commerce, beaucoup y adhéreraient
Au-delà de la prévention, la question de l’assurance des marchands reste un point sensible. Sanae, vendeuse de tissus, regrette l’absence d’une couverture accessible : « Nous ne sommes pas assurés car cela coûte trop cher. Si une formule collective était proposée par la mairie ou la chambre de commerce, beaucoup y adhéreraient. »
L’idée d’un fonds d’urgence communal pour aider les sinistrés à relancer leur activité est également évoquée. D’autres s’inquiètent d’éventuels actes de malveillance. « La nuit, il n’y a personne pour surveiller. Des gardiens et des caméras de sécurité seraient d’une grande efficacité« , affirme Rachid, cafetier.
Les incendies récurrents dans les marchés de Tanger ne sont pas seulement des drames économiques, mais aussi des signaux d’alarme quant à la nécessité d’une modernisation des infrastructures. Entre le manque de prévention, l’absence d’assurance et les difficultés d’accès aux secours, les marchands se retrouvent abandonnés.
Tanger accueille plus de 3 000 demandeurs d’emploi quotidiennement.
Tanger, ville en pleine mutation, accueille chaque année de nombreuses familles venant des villages voisins en quête d’emploi. Comme l’a rappelé le président du conseil régional Omar Moro dans une réunion périodique du conseil, Tanger accueille plus de 3 000 demandeurs d’emploi quotidiennement. Un chiffre qui interpelle les opinions, celles-ci demeurent controversées et très équivoques.
Beaucoup investissent leurs économies dans ces marchés pour survivre, mais voient leur travail s’effondrer en quelques instants. Sans solutions concrètes et rapides, le risque d’une explosion sociale devient une menace réelle.
Les commerçants sinistrés attendent des réponses et des mesures concrètes pour éviter que ces drames ne se reproduisent. La modernisation des marchés, une meilleure prévention et une aide financière sont plus que jamais nécessaires pour garantir des conditions de travail sécurisées et sereines.