
A l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre la traite des êtres, la Commission nationale de coordination des mesures de lutte et de prévention contre la traite des êtres humains et ses partenaires ont dévoilé les grandes lignes en matière de protection des enfants au Maroc. Est-ce le début d’un combat effectif contre un fléau social ?

Des enfants utilisés à des fins de mendicité, des enfants exploités sexuellement dans le tourisme sexuel à Marrakech, des enfants marocains ou étrangers aux frontières de Melilla et Sebta pris dans les réseaux de trafic des êtres humains ; les manifestations de crimes pouvant être assimilées à du trafic des êtres humains sont nombreux sur le territoire marocain. Mais les moyens de riposte, de lutte et de sensibilisation semblent faire défaut.
CESE : « Insuffisance des moyens »
C’est d’ailleurs le constat de l’avis du Conseil économique, social et environnemental (CESE) sur le volet de la lutte contre la mendicité : « En 2022, le bilan du plan national de lutte contre la mendicité des enfants dans les sept préfectures et provinces couvertes se limite uniquement à 500 enfants pris en charge. Ces résultats insuffisants du plan national s’expliquent notamment, par l’insuffisance des moyens financiers, matériels, logistiques et humains, l’absence de structures d’accueil et d’accompagnement, la faiblesse des filets sociaux et le manque de coordination entre les différents intervenants, autant de facteurs qui entravent la mise en place d’une prise en charge de qualité des enfants exploités dans la mendicité », écrit le CESE dans son avis rendu public en 2024. Face à ces risques majeurs pesant sur les enfants au Maroc, différentes institutions marocains et leurs partenaires internationaux souhaitent accélérer la lutte contre la traite des enfants.
Cette rencontre tenu le 25 juillet dernier à Rabat a rassemblé tous les acteurs concernés par les enjeux de la lutte contre la traite des êtres humains. Organisée par le ministère de la Justice, elle a permis de faire le bilan sur les actions des institutions marocaines dans ce domaine et les efforts qui restent à déployer pour assurer une protection des enfants. Au moins un tiers des victimes de la traite d’êtres humains dans le monde sont des enfants. C’est pourquoi la campagne « Cœur Bleu » de l’Organisation des Nations Unies (ONU) met cette année l’accent sur la lutte contre la traite des enfants Sur le territoire marocain.
Les enfants face aux risque de la traite
Le thème de la campagne « Cœur bleu » des Nations Unies de cette année est « Ne laissons aucun enfant de côté dans la lutte contre la traite des êtres humains », cette rencontre s’inscrit dans le cadre des efforts déployés par le CNCLT à travers la sensibilisation à ses dangers pour les enfants et les adolescents dans l’espace numérique, dans le cadre de l’activation du Plan national de lutte et de prévention contre la traite des êtres humains 2023-2030.Intervenant à cette occasion, le ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi a souligné que « la traite des êtres humains fait partie des crimes les plus graves attentant à l’humanité qui requiert un examen approfondi sur le plan juridique selon des textes spécifiques », insistant « sur l’importance d’approfondir la formation sur la notion de la traite des êtres humains ».
« Cette rencontre vient pour faire entendre la voix des victimes ainsi que pour renforcer les efforts et la collaboration entre tous les acteurs, afin de lutter et mettre fin à toutes les formes de traite d’êtres humains »
Hicham Mellati
Le ministère de la justice qui assure le secrétariat permanent de la Commission nationale de coordination des mesures de lutte et de prévention contre la traite des êtres humains (CNCLT) au sein de la Direction des Affaires pénales. Son directeur rappelle les objectifs de cette rencontre : « Cette rencontre vient pour faire entendre la voix des victimes ainsi que pour renforcer les efforts et la collaboration entre tous les acteurs afin lutter pour mettre fin à toutes les formes de traite humaine », souligne Hicham Mellati, directeur des affaires pénales, des Grâces et de la Détection du crime au sein du ministère de la Justice.Partenaire de la CNCLT, l’Ambassade de l’Union Européenne (UE) au Maroc a rappelé les risques mondiaux qui pèsent sur les enfants dans le monde. Patricia Llombart Cussaca, ambassadrise de l’UE à Rabat soutient cette campagne qui vise à « mobiliser l’opinion publique contre la traite des êtres humains et à encourager l’ensemble des citoyens à s’impliquer et soutenir la lutte contre ce crime abominable, faisant état d’environ de 27 millions de personnes victimes du fléau à travers le monde ».
« Soutenir la lutte contre ce crime abominable, faisant état d’environ de 27 millions de personnes victimes du fléau à travers le monde ».
Selon le dernier rapport mondial sur la traite des personnes de l’ONUDC, les enfants sont deux fois plus susceptibles d’être victimes de violence en situation de traite que les adultes. Dans des régions telles que l’Afrique subsaharienne, l’Afrique du Nord, l’Amérique latine et les Caraïbes, les enfants représentent 60 % des victimes de la traite détectée.
Les enfants sont deux fois plus susceptibles d’être victimes de violence que les adultes en situation de traite humaine.
Travail de sensibilisation
Dans le même sens, Mellati a également expliqué que, depuis sa création, la Commission a travaillé « sur la prévention et la sensibilisation ». Selon lui, « le premier pas important est d’aller à la rencontre des victimes, de les identifier, puis de les aider ».
« Le comité a accompli de nombreux progrès et déployé des efforts significatifs pour renforcer la capacité de tout les acteurs à détecter les cas de traite d’êtres humains et à assurer leur protection », estime-t-il.
Organisée en partenariat avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et avec le soutien de l’Union européenne sous le thème “Faisons de la protection de nos enfants contre l’exploitation sur Internet une priorité”, en harmonie avec le thème de la campagne des Nations Unies de cette année.
Cette rencontre a été marquée par la projection en avant-première d’un film destiné aux enfants ainsi qu’à leurs parents, la présentation de bandes dessinées de sensibilisation et de prévention de la traite des personnes ciblant les enfants, la remise de valises pédagogiques et par un hommage rendu aux partenaires de la campagne “Cœur bleu”.
Dans le cadre de cette même campagne, La CNCLT a organisé le 26 juillet dernier, un séminaire interactif pour les membres du Parlement de l’Enfant, sous le thème “Faisons de la protection de nos enfants contre l’exploitation sur internet notre priorité”.