Transparency : « Au Maroc, la corruption est systémique »

Transpare

Le Maroc poursuit sa descente dans l’Indice de perception de la corruption publié par Transparency International. Un nouveau signe de la faiblesse des efforts publics en matière de lutte contre la corruption et les conflits d’intérêts. Les explications de Transparency Maroc.

C’est au siège de Transparency Maroc que l’équipe de la principale association marocaine de lutte contre la corruption a tenu ce point de presse le 11 février à Rabat. Et les nouvelles ne sont pas bonnes ! En matière d’efforts de lutte contre la corruption dans le pays, le pays recule dans le principal classement mondial. Avec un score de 37/100, soit un point de moins qu’en 2023, le royaume se classe désormais à la  99e place sur 180 pays.  Cette tendance à la baisse se confirme sur cinq ans : en 2019, le Maroc obtient encore 41/100, mais son score n’a cessé de baisser, perdant un point chaque année.

Avec un score de 37/100, soit un point de moins qu’en 2023, le Maroc se classe désormais  au 99e  rang sur 180 pays.

Le nexus corruption et état de la démocratie

« Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus un pays est démocratique, plus il obtient un bon score en matière de lutte contre la corruption ». 

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : « plus un pays est démocratique, plus il obtient un bon score en matière de lutte contre la corruption. Les États pleinement démocratiques affichent une moyenne de 73 points, tandis que les régimes autoritaires stagnent à 29 », indique Transparency Maroc. 

Un autre facteur clé pèse sur l’Indice de perception de la corruption (IPC) : l’état de la presse et celui de la société civile. Les pays où ces libertés sont respectées atteignent en moyenne 70 points, alors que ceux qui les répriment plafonnent à 31.

Un autre facteur clé pèse sur l’Indice de perception de la corruption (IPC) : l’état de la presse et de la société civile. Les pays où ces libertés sont respectées atteignent en moyenne 70 points, alors que ceux qui les répriment plafonnent à 31.

Corruption au Maroc : Un recul inquiétant

Dans ce contexte, la situation du Maroc ne cesse de se dégrader. En 2024, le pays recule d’un point, et se place au 99ᵉ rang sur 180 — soit deux places de moins qu’en 2023. Ce recul s’inscrit dans « une tendance inquiétante » qui dure depuis plus d’une décennie.

Depuis 2012, « la corruption au Maroc reste un phénomène endémique et systémique, sans réelle volonté de changement ». En début de période, le pays occupait la 88ᵉ place du classement mondial. 

Ce déclin souligne l’impact direct des déficits démocratiques et des atteintes aux droits humains sur la perception de la corruption. « Sans réformes structurelles et sans renforcement des contre-pouvoirs, cette tendance risque de se poursuivre », insiste l’association Transparency Maroc. 

Le constat d’Ahmed Bernoussi, secrétaire général par intérim de Transparency Maroc, est sans appel : « le Maroc continue de perdre du terrain en matière de lutte contre la corruption ».

« Cette année encore, le pays recule, à la fois en classement et en notation. Par rapport à 2023, il perd deux places et un point supplémentaire », Ahmed Bernoussi, secrétaire général par intérim de Transparency Maroc.

« Cette année, le pays recule davantage, à la fois en classement et en notation. Par rapport à 2023, il perd deux places et un point supplémentaire », déclare-t-il à ENASS.

Un déclin qui s’inscrit dans une tendance plus large : entre 2018 et 2024, le Maroc a chuté de 26 places et perdu six points dans l’Indice de perception de la corruption. Pour Bernoussi, « cette détérioration illustre l’absence de mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la corruption, ainsi que le retard dans l’application des lois prévues par la Constitution de 2011 », note-t-il. 

Restrictions sur les associations

Mais un autre point suscite l’inquiétude : un projet de loi du gouvernement visant à réviser la procédure du Code pénal. « Ce texte interdit à la société civile et aux citoyens de déposer plainte contre des faits de corruption », explique Bernoussi. De plus, il restreint les prérogatives du pouvoir judiciaire : « Le procureur du Roi ne peut engager d’enquête que sur instruction du président du ministère public, et seulement après un signalement officiel d’une institution publique ou d’une inspection ministérielle. »

Pour Transparency Maroc, cette réforme remet en question les engagements du pays dans la lutte contre la corruption, et va à l’encontre de la Constitution et des conventions internationales ratifiées par le Maroc. « Ce projet limite drastiquement les recours contre la corruption, que ce soit pour la société civile ou la justice. À nos yeux, il est tout simplement anticonstitutionnel », conclut Bernoussi. 

Dans ce contexte, Transparency Maroc avait annoncé le 27 janvier la suspension de sa participation à la Commission nationale anti-corruption (CNAC), invoquant « l’absence de signaux tangibles démontrant un engagement effectif des pouvoirs publics en faveur de la lutte contre la corruption ». 

L’état de lutte contre la corruption 

Sur le continent africain, le Botswana et le Rwanda (57/100) font figure d’exception avec des scores bien au-dessus de la moyenne. Derrière eux, le Bénin, la Côte d’Ivoire et le Sénégal atteignent chacun 45 points, suivis de l’Afrique du Sud (41),quand la  Tunisie se situe légèrement en dessous avec 39 points.

Avec 34 points, l’Algérie, le Malawi et le Niger partagent le même classement, juste devant la Sierra Leone (33), l’Angola, le Kenya et le Togo (32), Djibouti (31), l’Égypte (30), ainsi que l’Eswatini, le Gabon, le Liberia et le Mali (27). 

Au niveau continental et mondial, la Libye affiche l’un des pires scores avec 13 points. En revanche, dans la région arabe, certains pays obtiennent de meilleurs résultats : les Émirats arabes unis (68), le Qatar et l’Arabie saoudite (59), Oman (55) et le Koweït (46).

À l’échelle mondiale, le classement reste dominé par le Danemark (90), la Finlande (88), Singapour (84), la Nouvelle-Zélande (83), suivis du Luxembourg, de la Norvège et de la Suisse (81), de la Suède (80) et des Pays-Bas (78). L’Australie, l’Islande et l’Irlande ferment le top 10 avec 77 points.

À Lire aussi
  • Résistance au féminin

    Les éditions iXe publient une nouvelle traduction par la poétesse Souad Labbize du témoignage de Fatna El Bouih sur son incarcération et sur ses engagements. À 21 ans, on fait ses études et on rêve d’un monde plus juste. Les enlèvements, ce sont des scènes des Mille et Une nuits, « des histoires des temps anciens », comme disait…

    Toutes peines confondues fatna el bouih
    4 heures ago
  • La Fédération de la Gauche :  L’université de l’espoir et des luttes

    La Fédération de la Gauche démocratique (FGD) a organisé du 18 au 20 avril dernier à El Jadida sa première Université de printemps. Focus sur la séance d’ouverture.

    Img 0625

    Actualités

    22 April 2025
  • Requiem gouailleur pour la Mère

    Le dernier récit de Saïd Mohamed est à la fois l’hommage funèbre à la Mère et un acte de « réalitture ». Détonnant. « Moi, pas question qu’on me mette une plaque sur la goule », annonçait, tonitruante de gouaille, la Mère, anticipant sa fin prochaine : « Le jour de mon enterrement, peut-être bien que vous chialerez, si ça vous…

    Sur la tête de ma mère saïd mohamed
    18 April 2025
  • Inscrivez-vous à la Newsletter des Sans Voix 


    Contre l’info-obésité, la Newsletter des Sans Voix