Les ouvrières agricoles : Exploitations et harcèlement 

Ouvriers agricoles 4

Leurs conditions de travail sont très dures, beaucoup d’ouvrières agricoles travaillent sans contrat ni sécurité sociale et font face à différentes formes de stigmatisation sociale. Bouchra Chetouani, coordinatrice nationale du groupe Jeunes femmes pour la démocratie, nous parle de la situation des ouvrières agricoles au Maroc.

Bouchra Chetouani, Coordinatrice nationale du groupe Jeunes femmes pour la démocratie

ENASS: Les ouvrières agricoles jouent un rôle clé dans le secteur agricole au Maroc, mais les conditions de travail restent dures. Comment évaluez-vous la situation de ces femmes aujourd’hui ?

Bouchra Chetouani: En 2022, les conditions de travail pour les ouvrières agricoles restent toujours au-dessous des standards nationaux sur le marché du travail. Ce sont des conditions inhumaines. Ces femmes vivent une misère tous les jours. Cette misère commence avec « l’mouqef ». Puis la souffrance se poursuit avec des conditions de travail dures dans les exploitations agricoles. La précarité se reflète dans des salaires structurellement bas, l’absence de contrats et de sécurité sociale pour la plupart d’entre elles. Elles n’ont aucune sécurité d’emploi. Sans un changement de la loi relative au travail saisonnier, et plus particulièrement le travail agricole, la situation restera la même et on ne peut pas parler d’un changement ou d’une amélioration dans les conditions de ses ouvrières agricoles.

“Sans un changement de la loi relative au travail saisonnier, et plus particulièrement le travail agricole, la situation restera la même”.

ENASS: Le problème du transport des ouvrières persiste-t-il dans la Région du Souss ? 

Bouchra Chetouani: Oui, il y a juste une semaine, il y a eu un accident près de Ait Amira, un pick-up transportant des ouvrières s’est renversé. Heureusement il n’y a pas eu de perte de vies humaines. Ce n’était pas quelque chose de nouveau puisqu’on a l’habitude de vivre ce genre de drames. Pour les femmes c’est un réel traumatisme. Et comme elles le disent à chaque fois, l’arrivée saine et sauve à la ferme est une nouvelle page dans leur vie, tellement ce déplacement est périlleux et se fait dans des conditions déplorables et inhumaines. 

” Ce déplacement vers les fermes est périlleux et se fait dans des conditions déplorables et inhumaines”. 

ENASS: Quelles sont les actions que vous menez au sein du groupe JFD afin de défendre les droits de ces ouvrières ?

Bouchra Chetouani: On travaille toujours sur la campagne YOUDA pour un plaidoyer local au sein des institutions locales et en partenariat avec d’autres ONG, afin de donner la parole aux travailleuses agricoles à travers la diffusion de témoignages portant sur les difficultés qu’elles rencontrent, ainsi que les discriminations et violences sexuelles qu’elles subissent. Par ailleurs, je suis coordinatrice d’un projet intitulé IHMINI « Protège-moi » qui vise à sensibiliser les ouvrières, les entrepreneurs et les institutions à l’importance de la déclaration à la CNSS.

ENASS: Quelles sont vos recommandations afin de garantir les droits de ces ouvrières agricoles ?

Bouchra Chetouani: Nous avons déjà publié un mémorandum contenant plusieurs recommandations qui dénoncent l’absence de contrats de travail et de couverture médicale, ainsi que le dépassement des heures de travail régulier, le risque permanent de violences sexuelles, les risques inhérents aux conditions de transport, la difficulté d’accès aux services de base, au droit et à la justice à cause de la vulnérabilité…Mais la recommandation la plus importante, à mon avis, porte sur l’élaboration d’une nouvelle loi sur le travail saisonnier. Ceci nous paraît comme étant l’urgence du moment. 

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