Oubenal : Les cultures locales entre mépris et valorisation

Idees

« Les droits culturels à l’œuvre, la personne au cœur » est un « ouvrage collaboratif » coordonné par Danielle Pailler chez En Toutes Lettres. Mohamed Oubenal, chercheur et sociologue sur la culture amazighe observe la manière avec laquelle les cultures locales sont pris dans l’étau du mépris et de la valorisation. Bonnes feuilles.

« Il s’agit, dans notre cas, d’effectuer un même mouvement de subversion, d’un côté, de la vision colonialiste ».

« Il s’agit, dans notre cas, d’effectuer un même mouvement de subversion, d’un côté, de la vision colonialiste qui tentait de conserver les traditions pour les besoins du tourisme et pour donner une bonne image de la “mission civilisatrice” du colonisateur, en empêchant les tentatives d’innovation et, d’un autre côté, de la vision chauviniste qui pouvait naître d’un nationalisme religieux ou identitaire débridé. Certaines politiques culturelles “nationalistes” pouvaient en effet rapidement virer à l’essentialisation de l’identité en considérant, par exemple, que des éléments culturels appartiennent exclusivement à tel ou tel peuple, alors que les dynamiques d’hybridation et d’interdépendances sont puissantes et ne tiennent compte ni des frontières ni des différences religieuses ou linguistiques. 

Il était donc aussi important de rester vigilant face à la vision colonialiste qui présupposait la supériorité des cultures européennes et américaines, que d’avoir un regard critique sur une forme de “sur-patriotisme culturel” qui considèrerait que des éléments patrimoniaux ancestraux comme le couscous, qui existe en Afrique du Nord dans des formes variées, ou encore les mosaïques ornementales, zellige, qu’on trouve chez les communautés d’artisans aussi bien à Fès, à Grenade qu’à Tlemcen, seraient la propriété exclusive d’institutions datant de l’époque moderne telles que les États-Nations. »

Mohamed Oubenal est chercheur en sociologie à l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) à Rabat où il travaille sur les transformations socioéconomiques dans l’Anti-Atlas ainsi que sur la sociologie de la culture amazighe en milieu urbain et sur les musiques amazighes. Titulaire d’un doctorat en sociologie de l’Université Paris-Dauphine, il est spécialiste de sociologie économique et d’analyse de réseaux. Il a récemment coordonné des numéros spéciaux portant sur des thématiques liées aux élites économiques dans des revues telles que Mondes en Développement, ⴰⵙⵉⵏⴰⴳ/Asinag et la Revue française de sociologie. Il a également publié des articles dans les revues internationales : Ecology and Society, Journal of International Relations and Development, Middle East Development Journal et Gérer & comprendre.

Les droits culturels à l’oeuvre, la personne au coeur | collectif coordonné par Danielle Pailler | octobre 2024 | 356 pages | 95 DH / 20 €. Pour commander : 


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