Le CNDH, Trump et la poudre aux yeux
La Chronique Migrations est une revue de presse commentée de la semaine et traitant des principales actualités relatives aux questions migratoires au Maroc et dans le monde. C’est parti pour #2

Je vous parle cette semaine du CNDH et son autocensure migratoire, de Trump et les conséquences sur la vie des réfugiés au Maroc et d’un programme danois au maigre bilan sur le thème des enfants se trouvant sur les routes.
Le CNDH et le Human Right Washing
Que fait le CNDH pour suivre et défendre les droits des personnes en migration au Maroc et sur le terrain ?
Le CNDH et sa présidente reçoivent des multiples prix internationaux et continentaux. Le dernier en date est celui reçu de la part du Groupe africain sur la migration au sein du Réseau africain des institutions nationales des droits humains (NANHRI). Tout ceci est magnifique. Mabrouk ! Mais concrètement que fait le CNDH pour suivre et défendre les droits des personnes en migration au Maroc et sur le terrain ? Que font ces commissions régionales dans un contexte de détérioration des droits des personnes en migration, marocaines ou étrangères ?
Ces rapports annuels demeurent très prudents et utilisent des euphémismes pour parler des violences subies par les migrants sur le territoire national. Tout le monde se rappelle du rapport du CNDH sur les évènements du 24 juin 2022 criminalisant les Exilés soudanais et dédouanant les autorités de tout usage de la violence, avant même l’enquête judiciaire. Disons les choses explicitement : le CNDH version Bouâyach est une « lessiveuse » des violations des droits humains autour des migrations, entre autres. C’est du Human Right Washing en saupoudrant du jargon recyclé depuis les conventions et autres pactes désuets. C’est bien joli les discours tenus à Genève ou à New York, mais sur le terrain marocain c’est le vide sidéral. Pour les distinctions, on passera…même Trump aura le Prix Nobel de la Paix cette année.
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Trump, « la franchise d’un voyou »
« L’effet de Trump » se déteint aussi sur les programmes d’aide au développement et les migrations.
Parlons de Trump. Mister Donald continue de s’acharner sur les personnes en migration. L’effet de ses politiques atteint le Maroc. Comme le rapporte le média espagnol, El Periodico plusieurs réfugiés en attente de réinstallation aux Etats-Unis, sont aujourd’hui bloqués au Maroc. « Ali avait presque tout pour partir aux États-Unis. Il ne lui restait plus qu’à recevoir l’appel pour se rendre à l’aéroport. « Maintenant, je ne peux qu’attendre, c’était ma seule option, j’ai peur de rester coincé au Maroc », peut-on lire dans ce reportage du média espagnol. Ce sont plusieurs dizaines de personnes qui se trouvent dans le flou suite aux décisions américaines. 171 réfugiés avaient été réinstallés aux USA en 2023 et le dernier vol en décembre 2024. Le même média rapporte que « l’effet de Trump » se déteint également sur les programmes d’aide au développement comprenant de l’argent américain, notamment le programme Forsaty piloté par l’OIM dans le nord du Maroc. Le rouleau compresseur qu’est Trump a un seul mérite : montrer le vrai visage des politiques migratoires. Chez l’homme d’affaires, pas de discours « droits de l’homiste », mais des violations des droits humains assumés pleinement.
150 mineurs sensibilisés, Maigre bilan !
Tout ça pour ça ! C’est le commentaire que m’inspire le bilan « d’une campagne de sensibilisation sur les risques de la migration irrégulière pour les enfants non accompagnés et séparés ». Quatre institutions aux moyens conséquents (OIM, HCR, Ministère Public, la Commission nationale de coordination des mesures de lutte et de prévention contre la traite des êtres humains) visant quatre villes : Casablanca, Marrakech, Oujda et Nador avec au final la sensibilisation de 150 mineurs non accompagnés ! Maigre bilan sur un dossier très lourd. Le communiqué des organisateurs évoque le cas de 1042 mineurs identifiés sur les routes en l’année 2024.
Cette campagne lancée en novembre 2024 expéditivement, suite aux évènements du 15/09 s’apparente à un écran de fumée.
Cette campagne lancée en novembre 2024, visiblement à la hâte suite aux évènements du 15/09, s’apparente à de la poudre aux yeux. Comment peut-on sensibiliser les jeunes sur ce thème compliqué en un temps si restreint ? Quelle serait l’efficacité de ces campagnes sachant que de multiples travaux scientifiques montrent le faible impact de ce type d’actions ? Quid de la protection et de l’hébergement d’urgence de ces enfants ? Pourquoi ce type de projets évacue-t-il la responsabilité des acteurs publics dans les violations commises contre les enfants aux frontières ? Des questions qui attendent des réponses…
Et à la semaine prochaine sur les routes migratoires…