Crise de la méthadone : Les revendications des associations

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Le Maroc fait partie des rares pays de la région MENA à disposer  d’une politique publique  pour lutter contre les troubles addictifs notamment les usages des drogues dures. La récente crise de l’approvisionnement de la méthadone révèle les limites de cette politique.   

En 2016 le Maroc comptait, 18 500 personnes s’injectant  des drogues. Ce chiffre devait être en hausse neuf ans après, si certaines mesures préventives avaient été prises. Cette forme d’addiction est un fléau au nord et au nord-est du pays. Pour cette raison, le Maroc dispose d’un Plan stratégique national de prévention et de prise en charge des troubles addictifs chapeauté par la Direction de l’Epidémiologie et de Lutte contre les Maladies, soutenu par la coopération internationale et géré sur le terrain par un maillage associatif assez dense. Ce plan appuie « les gestionnaires aux niveaux régional et provincial et les prestataires en addictologie, notamment les centres d’addictologie ambulatoires et les centres implantés en résidentiel dans les CHU », indique le ministère de la Santé dans un document de cette stratégie publique.

Le Maroc compte 18 500 personnes qui s’injectent des drogues. 

La politique du ministère est basée sur trois piliers : « La prévention de l’usage de substances et des addictions aux produits ou comportementales ; Le diagnostic précoce, la réduction des risques et la prise en charge médico psychologique des addictions et des comorbidités psychiatriques ; La réhabilitation et la réinsertion socioprofessionnelle », énumère le même document. Ce plan dispose d’un Programme national de Prévention et de Prise en Charge des Troubles Addictifs. La récente crise de l’approvisionnement de la méthadone jette un doute sur l’efficacité de cette politique.

La récente crise de l’approvisionnement de la méthadone jette un doute sur l’efficacité de cette politique.

Quatre revendications

L’offre de services de soins en addictologie « s’est rapidement développée au cours des dix dernières années grâce à un engagement politique de très haut niveau », indique le département de la Santé. On compte actuellement 18 structures spécialisées en addictologie. « Ces structures sont caractérisées par leur vocation à offrir des services médicosociaux mettant le bénéficiaire au centre des interventions », souligne le ministère. Dans les faits, la conduite de cette politique n’est pas exempte de critiques. 

Dès le 6 mars dernier, les quatre principales associations travaillant sur ce sujet, publient un communiqué pour alerter l’opinion publique face à la « crise de la méthadone ». Il s’agit d’un communiqué publié par l’Association Hassnouna pour le soutien aux usagers de drogues à Tanger, l’Association nationale pour la réduction des risques liés aux drogues (RdR Maroc), l’Association de lutte contre le sida (ALCS) et la Coalition internationale de préparation au traitement pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (ITPC-MENA).On pouvait lire dans ce document : « Nous tirons la sonnette d’alarme, et lançons un appel urgent à toutes les parties concernées : Ne laissez pas les patients seuls face à cette situation difficile et ne laissez pas la crise sanitaire se transformer en crise humanitaire et sociale ». Aujourd’hui, la crise semble être résolue et l’approvisionnement a repris le 22 mars. Mais les inquiétudes persistent. 

Les quatre associations portent revendications. La première, et de respecter  les droits des patients. « Il faut s’engager à ce que toute modification des doses de méthadone ne se fasse qu’avec le consentement éclairé des patientset conformément aux protocoles scientifiques », soulignent ces organisations spécialisées et dont certaines gèrent des centres sociaux sanitaires. 

La deuxième revendication vise à trouver des solutions alternatives aux ruptures de stock. « Il faut explorer des options de traitement temporaire, sous contrôle médical, pour compenser les pénuries tout en minimisant les risques pour les patients », appellent-elles. 

La troisième recommandation est relative à la gestion des stocks. « Il est nécessaire d’élaborer un plan pour prévenir les ruptures de stock, notamment en améliorant la gestion de l’approvisionnement et en renforçant la coordination entre les parties prenantes ». 

La quatrième revendication concerne le travail participatif avec la société civile. « Il faut travailler en étroite collaboration avec les sociétés civiles, pour trouver des solutions durables et veiller à ce que les droits et les besoins des patients soient au cœur des décisions prises », insistent ces associations. 

« La santé est un droit fondamental et l’accès aux médicaments essentiels comme la méthadone est une obligation morale et légale ».

Enfin, les associations rappellent que « la santé est un droit fondamental et l’accès aux médicaments comme la méthadone est essentiel, une obligation morale et légale de surcroit».

L’étude 2016 estimait à 18500 les personnes qui s’injectent des drogues au Maroc, avec des prévalences élevées du VIH (11,4%) et de l’Hépatite C (57%). 

L’offre de soin concentrée au nord

L’offre de soins disponible pour la lutte contre les addictions concerne essentiellement les usagers de drogue, et se concentre sur le nord et le nord-est du pays. Il s’agit d’une offre de prestations principalement de proximité axée sur des structures ambulatoires ,relevant du réseau des établissements médico-sociaux (REMS), « des unités hospitalières (5 lits) intégrées dans les hôpitaux (psychiatriques ou généraux), principalement pour le sevrage et la prise en charge des comorbidités, des points de consultations dans les établissements de soins de santé primaires (principalement les centres de santé (CS) de niveau II, en plus de services ou centres d’addictologie relevant du secteur universitaire ,et assurant à la fois des consultations ambulatoires et des hospitalisations (15 lits) », indique le ministère de la Santé. 

Les centres d’addictologie mis en place dans les villes du nord et du nord-est du pays, ont la spécificité de « disposer d’unités bas seuil d’exigences intégrées et offrant des services dédiés aux personnes à usage problématique des substances (usage de drogues injectables) ». 

Dans les villes de Tanger, Tétouan et Nador, « les centres offrent le traitement de substitution aux opiacés (par la méthadone), vue la spécificité épidémiologique de ces sites. Le dispositif de traitement de substitution aux opiacés, continue également à être offert par les deux centres résidentiels universitaires à Casablanca et à Salé où cette offre a été instaurée en expérience pilote depuis 2010 », explique le département de la Santé. 

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